Prévention cardiovasculaire et loterie

Une part fondamentale du travail / rôle du médecin généraliste étant dévolue à la prévention des maladies cardio-vasculaires, il est étonnant de constater à quel point ce sujet manque de références applicables en pratique courante et suscite encore de discussions. Pour ma part je croyais avoir tout compris. Heureusement ce n’est pas du tout le cas.

Il est bien établi aujourd’hui que les décisions pour la prévention cardiovasculaire doivent se prendre en fonction du risque global individuel et des buts du patient. Pour cela il faut pouvoir évaluer le risque et le présenter sous une forme compréhensible et parlante. Je rappelle à ce propos le 5ème commandement pour un traitement centré sur le patient :

5- Tu traiteras en fonction du niveau de risque et non pas du niveau de facteur de risque

Traiter des individus asymptomatiques pour prévenir des événements adverses futurs nécessite un processus de partage d’information différent et plus long que traiter une affection aiguë non compliquée… Des interventions à vie devraient être déterminées en fonction de l’importance du résultat pour chaque personne, pas sur l’extrapolation de la réduction d’événements dans une population globale. Les gens varient largement dans leurs comportement vis à vis de la prévention de la mort, de l’infarctus du myocarde, de l’AVC ou des différentes sortes de cancers ainsi que dans la manière dont ils soupèsent les bénéfices et les risques des traitements.

La proposition d’un traitement préventif  – qu’il soit primaire ou secondaire – doit prendre en compte les buts de ces individus, buts qui peuvent changer dans le cours du temps. Il ne devrait pas viser la réduction d’un simple facteur de risque mais la totalité du risque pour une conséquence particulière.

Le manque d’outils pour évaluer cet agrégat de facteurs de risque et en partager l’analyse avec le patient m’avait amené faire quelques recherches que j’ai résumées dans Recherche calculateur de risque CV désespérément. J’avais, au terme de ce travail, l’impression d’avoir trouvé un outil intéressant pour ma pratique : ce calculateur prend en compte de multiples facteurs de risque cardiovasculaire, il est au top de ce qui est actuellement recommandé en terme de présentation visuelle et chiffrée de l’information, il permet d’appréhender l’impact des interventions possible sur le risque global et, cerise sur le gâteau, il précise les risques de chaque type d’intervention. Bref, un outil à priori idéal pour soutenir une conversation de prise de décision partagée sur la prévention cardiovasculaire (je recommande au lecteur, pour mieux suivre, de le tester en sélectionnant Qrisk2 pour les raisons explicitées dans le billet sus-cité).

Je l’ai d’ailleurs utilisé à plusieurs reprises depuis et, si le plus souvent les patients expriment leur satisfaction d’avoir pu appréhender leur situation de cette manière, je me heurte à plusieurs interrogations :

  • J’ai fait une pirouette pour estimer que le risque calculé selon Qrisk2 pouvait être retenu comme un indicateur valable du risque global de morbi-mortalité cardiovasculaire en France. Au fond je ne suis pas du tout certain de la validité de cette pirouette. Et d’ailleurs si quelqu’un a une opinion je suis preneur.
  • J’ai beau expliquer aux patients que l’on ne parle que d’une partie des risques qu’ils encourent, à savoir les risques de morbi-mortalité cardiovasculaire, je ne suis pas sûr qu’ils réalisent ce que cela signifie.
  • Je ne sais pas relativiser ce risque par rapport aux autres risques. Autrement dit le risque cardiovasculaire n’est pas le seul. Certes les maladies cardio-vasculaires représentent la première cause de mortalité mais elles ne représentent, AVC compris, “que” 25% des causes de décès. 75% des gens meurent d’autre chose (source CépiDc).
  • Le modèle ne permet pas d’additionner les facteurs d’intervention pour l’abaissement du risque cardiovasculaire. On ne peut que comparer les interventions une par une ce qui n’est pas facile à expliquer. Enfin merde si le régime méditerranéen me fait gagner 6 points et l’activité physique 5, les 8 points que j’ai en trop deviennent -3 et je ‘ai pas besoin d’arrêter de fumer hein docteur ? Ben non.
  • A contrario des recommandations qui enjoignent de traiter l’HTA selon des seuils précis (mais toujours discutés), de traiter l’hyperglycémie avec objectif d’HbA1c à tel niveau ou encore de faire baisser le cholestérol en dessous de tel seuil, les interventions proposées dans ce modèle permettent de recalculer le risque global mais pas la valeur des critères intermédiaires. Autrement dit il permet de visualiser que la mise en place d’un traitement de l’hypertension va abaisser le risque global de x points, mais pas de combien il va abaisser la tension. La différence d’approche conceptuelle est d’une telle ampleur que je ne sais pas si les patients s’y retrouvent vraiment. Ni moi non plus d’ailleurs.
  • Sans compter que cela me pose des problèmes quasi insolubles : dois-je proposer traiter par un antihypertenseur cette femme de 60 ans qui a 170 de systolique et en conséquence 2 points de sur-risque de morbi-mortalité cardiovasculaire à 10 ans (sur un total de 6) alors qu’elle “gagne” théoriquement ces 2 points grâce à l’activité physique régulière qu’elle pratique déjà avec plaisir ?
  • Les gens ont été “éduqués thérapeutiquement” à la culture des critères intermédiaires. Même si visuellement le modèle montre que pour telle personne une activité physique régulière “efface” le sur-risque lié à un cholestérol un peu trop abondant, il lui reste difficile d’admettre que son niveau de cholestérol au fond, dans ce cas, on s’en fout.
  • La compréhension de leur niveau de risque cardiovasculaire aide-t-elle les patients à mettre en œuvre les interventions correctrices ? Réponse rapide : la première étude (Global cardiovascular risk assessment in the primary prevention of cardiovascular disease: overview of systematic reviews / chercher Collins dans la page) de l’impact de l’évaluation globale du risque cardiovasculaire sur la prévention primaire des maladies cardiovaculaires montre que la qualité de probante des revues systématiques existantes est limitée. Autrement dit on ne sait pas vraiment.
  • L’appréciation du risque telle que formulée dans ce calculateur permet-elle au patient d’avoir une vision claire des enjeux pour lui ?

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Toutes ces questions sont intéressantes et tout lecteur ayant une idée de réponse à l’une ou l’autre est prié de commenter sans délai. Creusons la dernière : est-ce que les modes d’évaluation du risque et de présentation de cette évaluation permettent au patient d’avoir une vision, une compréhension de son niveau de risque ? Car tant qu’elle n’est pas résolue il est très difficile de démarrer une bonne conversation avec les patients sur ce sujet.

La première question qui se pose est celle de la fiabilité des modèles de calcul de risque et justement il semble qu’ils ne le soient pas :  un article récent sur le sujet montre que les calculateurs de risque cardiovasculaire accordent un poids différent aux mêmes facteurs de risque. Pour chaque facteur de risque, l’augmentation du risque relatif calculé peut être jusqu’à 8 fois plus importante dans un calculateur que dans l’autre. Quelle époque, on ne sait plus à qui se fier mon bon Monsieur. Il faut évaluer le risque global mais les calculateurs sont faux. Hum.

La question suivante est celle du mode d’expression du risque. Au-delà du traditionnel pourcentage de risque sur un horizon donné fournissant une probabilité au niveau d’une population, probabilité que l’on tente d’appliquer à un individu, commence à apparaître une approche basée sur la durée de vie gagnée en cas d’implémentation d’une intervention donnée.

Cette approche est radicalement différente en ce qu’elle ne parle plus d’un niveau de risque global mais se concentre sur l’impact d’une intervention visant à l’abaisser. Il n’y aurait en substance aucun sens à dire à quelqu’un : “votre risque d’accident cardio-vasculaire à 10 ans est de 12% mais en prenant ce médicament régulièrement (ou en développant tel comportement) vous augmentez votre temps de vie de x mois ou de x années.” A contrario dire : “en prenant ce médicament ou en adoptant ce comportement vous gagnerez x mois ou x années de vie” me semble assez parlant.

Mais ce n’est pas possible.

D’abord parce que les modèles pour ce calcul (d’ailleurs introuvables) n’ont aucune raison d’être plus fiables que les autres, ensuite parce qu’on se retrouve encore avec des notions moyennes au niveau de la population et donc inapplicables en tant que tels au niveau individuel et qu’enfin cette approche donne des résultats pas très sexy comme par exemple 4 mois de vie totale gagnés grâce à un traitement à long terme par statines ou 8,5 mois de vie sans maladies cardiovasculaires gagnés. Pas de quoi générer une motivation de ouf.

Partant de là, il y a des petits malins plutôt forts en calcul et en statistiques qui ont écrit un article  qui a fait pas mal de bruit. A partir d’un modèle purement statistique prenant en compte une intervention abaissant le risque relatif de maladie cardiovasculaire de 30% ils ont pondu le schéma suivant :


t_Prévention-cardiovasculaire-.jpg(pour les nuls en anglais : lifespan = durée de vie, mean = moyenne, average = moyenne aussi, month = mois, gain = gain)


Il s’agit d’un modèle établi de manière purement mathématique selon des formules qui me dépassent tellement que j’ai l’impression d’être un bœuf. Mais intuitivement ça ne semble pas idiot comme raisonnement – on rejoint la notion de NNT : pour la plupart des gens bénéficiant d’une intervention abaissant le risque cardiovasculaire il n’y aura aucun effet sur la durée de vie. Par contre un petit nombre d’entre-eux auront un gain de durée de vie se chiffrant à plusieurs années (en moyenne 8,5), ce gain se répartissant parmi ces derniers de quelques mois à de nombreuses années.

Ils ont par ailleurs sondé des gens et observé qu’il existait une nette préférence de ceux-ci pour une petite probabilité d’un grand gain que pour une forte probabilité d’un petit gain. Celles et ceux qui jouent au loto me comprendront.

De multiples limites empêchent de prendre cette étude pour argent comptant dont la question des comorbidités qui rendent les choses moins cristallines. Je vous les laisse découvrir dans cet éditorial. Elles permettent d’affirmer que les valeurs citées sont forcément fausses. Mais la logique reste très intéressante et, sachant que nous n’avons rien de fiable en ce qui concerne les chiffres de calcul de risque en général et qu’il n’est pas démontré que la manière classique de présenter le risque (en x% à tel horizon) permette une bonne mise en œuvre des mesures préventives, retenons au moins l’idée forte : en mettant en œuvre une prévention cardiovasculaire un patient augmente ses chances de gagner de nombreuses années de vie supplémentaires. De quoi démarrer la conversation sur un mode nouveau.

En résumé et pour le fun : Évolution des modes d’expression et de communication du risque cardiovasculaire

  • degré zéro : les critères intermédiaires se substituent à l’expression du risque et servent à faire peur “votre cholestérol est trop élevé c’est dangereux, il faut l’abaisser”
  • degré zéro bis : les critères intermédiaires se raffinent : “votre mauvais cholestérol est trop élevé, c’est dangereux, il faut l’abaisser” (à noter que la CPAM en est restée à ce stade)
  • degré un : le risque est abordé globalement calculé en fonction des niveaux de différents facteurs de risque “vous avez 12% de risque d’avoir une maladie cardiovasculaire dans les 10 ans à venir” L’exemple classique est l‘antique SCORE.
  • degré deux : on ne parle plus du risque mais du gain en temps de vie en cas de mise en place d’une intervention : “en prenant ce médicament vous vivrez quatre mois de plus”
  • degré deux bis : comme le précédent mais avec une notion de loterie : “en prenant ce médicament à vie, ça ne changera à priori rien mais il y a une probabilité d’environ 7% que votre vie soit plus longue – en moyenne – de 8 ans”

What do you think ?

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Comment les statines peuvent être mortelles

Comme je suis un peu feignasse, j’essaye de trouver de bons arguments pour ne pas avoir à apprendre certains trucs. C’est toujours ça de gagné. C’est une des raisons (mais pas la seule je te rassure) pour laquelle j’aime bien la revue Prescrire. Par exemple je tombe sur la catégorie coxibs en lisant mon manuel favori. Comme je ne sais pas ce que c’est je cherche un peu et je trouve :

En France, mi-2012, les anti-inflammatoires de la famille des coxibs sont toujours commercialisés et remboursables, alors qu’ils présentent des effets indésirables graves parfois mortels …. je vous passe l’article mais vous pouvez le lire en cliquant ici … et ça conclut : en attendant, il revient aux soignants de ne pas prescrire Celebrex° ni Arcoxia° aux patients souffrant de douleurs rhumatologiques. Le paracétamol est l’antalgique de premier choix, puis en cas d’échec, les AINS tels l’ibuprofène (Brufen° ou autre) ou le naproxène (Naprosyne° ou autre) à la posologie minimale efficace et pendant la durée la plus courte possible.

Et là évidemment c’est cool parce que paracétamol, ibuprofène et naproxène je connais déjà. Et hop ! Tu vois ce que je veux dire. Sans compter que je sais quand même que le Vioxx appartenait a la famille des coxibs.

La première fois que je suis tombé sur les statines dans un de mes ouvrages d’étude, j’ai eu un peu le vertige. Non seulement il fallait apprendre plein de médicaments nouveaux avec plein d’effets indésirables mais en plus y’avait tout un système très compliqué précisant quelle statine et combien prescrire selon le niveau de cholestérol LDL et HDL, le niveau de baisse qu’on voulait obtenir et tutti quanti. J’ai commencé à fureter à droite à gauche pour chercher une échappatoire. Fort bien m’en a pris parce que c’est comme ça que j’ai fini par découvrir que le cholestérol n’était pas le coupable que l’on croyait, que les indications des statines étaient beaucoup plus limitées qu’on ne le disait dans ce manuel, dans le Vidal et toutes ces sortes de choses.

Et puis je sais pas pourquoi cette histoire de statines m’est restée en travers de la gorge. Si tu regarde le Vidal (base actualisée février 2015) on t’indique encore les statines en traitement des hypercholestérolémies primaires alors que c’est assez clair maintenant qu’il ne faut pas le faire en l’absence d’antécédents d’accidents cardiaques ou de facteurs de risques d’accident cardio vasculaires très élevés. Mais ça n’empêche pas que beaucoup de gens en prennent encore sans entrer dans ce cadre.

Ce matin, comme aujourd’hui c’est presqu’un pont (a-t-on des ponts quand on est à pôle emploi ?) j’ai pris le temps de regarder cette vidéo – attention elle fait peur, ne laissez pas les enfants devant. Et j’ai compris qu’au-delà des débats sur leur utilité (parfaitement résumé dans cet article) l’enjeu de la prescription des statines était plus grave.

Maladies à vendre

Il existe des moyens très simples, très efficaces, parfaitement connus, admis par tous et ne possédant aucun effet secondaire pour diminuer le risque d’accidents cardio-vasculaires. Ils sont parfaitement connus et ont un impact certain. Malheureusement ils sont difficiles à mettre en œuvre. Arrêter de fumer, manger un peu de tout sans déséquilibre, avoir une activité physique suffisante et régulière, boire modérément de l’alcool, maintenir son indice de masse corporelle à moins de 25 (ou à peine plus)… Si l’on n’est pas diabétique ni hypertendu – ou atteint d’un autre problème médical plus rare – respecter ces consignes est de très loin suffisant et ce que l’on peut faire de mieux pour diminuer le risque de maladies cardio-vasculaires, surtout pour les hommes de plus de 50 ans. Et peu importe si le cholestérol reste au-dessus de la « normale ».

Prescrire une statine à un patient sans pathologie avérée, sans antécédent d’accident cardio-vasculaire, juste pour faire baisser son cholestérol, c’est lui dire « bon t’a essayé de faire un régime, t’as essayé d’arrêté de fumer, t’as essayer de bouger plus, mais ton cholestérol est toujours un peu élevé alors tu vas prendre une petite statine et ça va le faire baisser. »

Lui prescrire une statine c’est lui dire t’en fais pas, la pilule va faire le boulot, pas besoin que tu te motive à t’en occuper toi même. Au lieu de l’encourager à continuer, de le soutenir dans ce difficile mais fondamental changement de comportement au quotidien.

Lui prescrire une statine c’est lui faire croire que c’est le cholestérol le principal problème et qu’une fois qu’il sera réglé avec le médicament il n’y aura plus de problème. C’est courir le risque qu’il abandonne les actions préventives les plus essentielles.

Lui prescrire une statine dans ces circonstances, c’est lui délivrer un message aux conséquences potentiellement mortelles.

La grande arnaque du cholestérol

« L’ennemi est bête. Il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui » – Pierre Desproges

Cela a commencé par un Tweet de @MartinWinckler (Marc Zaffran) avec un lien vers une émission de radio dans laquelle il parlait du livre Le grand Mythe du cholestérol de Sinatra et Bowden dont il a écrit la préface. Comme c’était un de mes sujets de travail, j’écoute. Et là j’apprends que le cholestérol n’est pas l’ennemi que je croyais, que c’est au plus un tout petit facteur de risque cardio-vasculaire, que chez quelqu’un en bonne santé et sans facteurs de risque connus (hypertension artérielle non corrigée, tabagisme ou diabète) il n’est pas nécessaire de le doser, que le sucre dans l’alimentation est bien plus toxique que la graisse, que les statines peuvent être utiles pour les hommes ayant de lourds facteurs de risques et en prévention secondaire seulement mais pas plus… Bref, je tombe de haut parce que dans mon livre de médecine générale de référence (100 situations clés en médecine générale de Schlienger), on me dit : « la prise en charge de l’hypercholestérolémie est primordiale », « les moyens d’intervention comprennent un changement de style de vie et surtout un traitement médicamenteux par les statines », « le choix de la molécule doit être en cohérence avec le % de réduction du LDL Cholestérol souhaité » , « le rapport bénéfice/risque des statines est remarquable », etc. Bref tout le contraire.

Alors moi je fait comment pour savoir la vérité ? Ce n’est pas déjà assez difficile de se mettre tout ce qu’il faut dans la tête, il faut en plus décider qui a raison ! En tous cas impossible d’en rester là.

J’ai commencé par acheter la version anglaise du livre en question, The Great Myth of Cholesterol..., en anglais pas pour frimer mais parce qu’elle était disponible de suite sur la boutique Kindle (avec 635 / 662 commentaires de 4 ou 5 étoiles, ça impressionne favorablement). J’ai été un peu gêné parce que l’un des auteurs (Sinatra, mais pas le Franck), a carrément un onglet Shop sur son site où il vend les compléments qu’il décrit dans son bouquin comme très utiles pour prévenir les maladies cardio-vasculaires. Petit coup de Tweet à @MartinWinckler qui me répond « Le livre est sérieux (les études citées aussi). Après, si Sinatra est un marchand de tapis… (enfin, de pilules…)« . Comme il y a environ 275 articles et études de cités dans le bouquin, je ne me suis pas senti capable de les évaluer. En tous cas ça faisait plus de sources et d’étude que dans mon livre où il y en a zéro. Alors je me suis mis à lire.

Chemin faisant j’ai aussi découvert des sites intéressants qui innocentent le cholestérol, animés par des médecins tout à fait remarquables. La saga du Cholesterol du Dr Dupagne (merci du lien DocDu59), The Cholesterol Myth du Dr Uffe Ravnskof un militant du scepticisme médical ou encore le blog de Michel de Lorgeril très bien fait. Si vous voulez creuser commencez par le Dupagne qui raconte l’histoire de cette arnaque depuis le début.

Parce qu’il faut bien le dire : le mythe du risque cardio-vasculaire lié au cholestérol est une arnaque. Je devrais écrire « semble bien être une arnaque » pour me couvrir – qui suis-je moi pauvre étudiant pour me prononcer sur un sujet qui a fait couler tellement plus d’encre et de millions de dollars que la lutte contre l’ebola ? – mais les faits sont là : « nous n’avons pas la preuve que ce cholestérol élevé est la cause de ce risque cardiovasculaire augmenté » (Dr Dupagne).

Voici comment Sinatra et Bowden innocentent le Cholestérol. Je fais court.

D’abord il faut savoir que le cholestérol est INDISPENSABLE et qu’on ne peut pas fonctionner sans. Ensuite qu’il est fabriqué surtout par le foie et que l’alimentation n’a que peu d’incidence sur son niveau. Si on en mange moins le foie en fabrique plus et lycée de Versailles.

Dans la genèse des troubles cardio-vasculaires, l’inflammation est au centre du problème. Lorsqu’il est oxydé, le cholestérol (essentiellement le LDL-B, une très faible fraction du LDL cholestérol) se colle à l’endothélium artériel (la membrane qui tapisse l’intérieur des artères) et provoque un processus inflammatoire dont la poursuite va entraîner la formation de la plaque d’athérome. Et comment qu’il s’oxyde le LDL-B demandent ceux qui suivent ? Par l’action des radicaux libres. Et les radicaux libres il y en a plus quand on fume, quand on est soumis à des insecticides, à une exposition trop importante au soleil, quand on est stressé, dans certains aliments, certains médicaments, par la pollution. La quantité de cholestérol ne joue pas. C’est l’oxydation par les radicaux libres qui joue et finalement entraîne l’inflammation ennemie.

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A cela s’ajoute le sucre. Et le sucre, comment qu’il nuit donc, lui, demanda t-on ?

Un effet très important de l’excès de consommation de sucres est la création d’une insulino-résistance c’est-à-dire que les cellules musculaires d’abord, les cellules adipeuses ensuite (qui normalement absorbent le sucre sous l’effet de l’insuline) ne l’absorbent plus aussi bien. Les conséquences sont dramatiques d’un triple point de vue : effet hypertenseur de l’hyper insulinémie (effet vasopresseur et rétention sodée), effet diabétogène par la résistance à l’insuline et effet pro inflammatoire – qui vient renforcer le mécanisme vu plus haut. A quoi s’ajoute une baisse du HDL Cholestérol, une augmentation des triglycérides et une obésité (grâce au sucre en trop qui a été stocké dans les cellules adipeuses). Vous suivez ? Moi j’essaye !

Juste comme ça en passant : Si on nourrit des humains avec une dose quotidienne de fructose égale à la quantité contenue dans 8 à 10 sodas on induit une insulino-résistance avec élévation des triglycérides en quelques jours !

Mais il ne fait pas que ça le sucre, il fait aussi la glycation : quand il y a excès de sucre (ce qui se produit en cas d’insulino-résistance), des molécules de sucre se collent aux protéines et forment les AGEs (Advanced Glycation End Products). Et ces AGEs, par tout un tas de mécanismes détestables que je renonce à comprendre, bouchent les capillaires aux plus mauvais endroits (oeil, rein, pied). Sans compter qu’elles déglinguent le LDL cholesterol et contribuent ainsi au processus inflammatoire vu plus haut.

On a donc un triple effet kiss cool sur le mécanisme inflammatoire au niveau de l’endothélium artériel : l’oxydation par les radicaux libres du LDL-B, l’inflammation due à l’insulino-résistance et celle due à la dégradation du LDL par les AGEs. Mais aucun effet direct du cholestérol.

Pour ceusses et celles qui ont appris le diabète et le syndrome métabolique et tout ça,  il ne devrait pas y avoir beaucoup de surprises à cette lecture. Sauf l’ordre des choses. Et c’est là que je saute au plafond : le coupable initial ce n’est pas le cholestérol mais le sucre, et le sucre est devenu d’autant plus coupable qu’il a remplacé la graisse dans l’alimentation. Particulièrement aux USA je vous l’accorde mais pas que, il n’y a qu’à aller au comptoir de vente de sucreries d’un multiplex un soir de blockbuster pour être impressionné.

Je la refait : on a incriminé le malheureux cholestérol (qui est pourtant fort utile) dans la genèse des troubles cardio-vasculaires. On a obligé de millions de gens à faire des régimes sans graisse. Du coup il ont mangé beaucoup de sucres, d’autant plus que les industriels ont développés des plats « sans cholestérol » mais pleins de sucre. On a même inventé les statines pour faire baisser le cholestérol et on les a fait avaler à des millions de gens pour rien, sauf pour des effets secondaires gratinés. A coup de plats sucrés, de boissons sucrées (les sodas bien sûr mais aussi les jus de fruits qui sont tout aussi toxiques, sous un air parfaitement innocent…) de viennoiseries et de snacks on a fabriqué une vaste population obèse, insulino résistante et à haut risque cardio-vasculaire. Tout à l’envers quoi.

A vrai dire j’arrive même pas à croire ce que j’écris.

Bon vous saviez peut-être tout ça déjà parce que vous êtes dedans depuis un moment. Où peut-être pas. Alors lisez le bouquin, lisez les blogs, lisez les études et dites-moi ce que vous en pensez. Parce que moi, perso, ça me perturbe.