Pourquoi croit-on que le coca c’est bon contre la déshydratation ?

Parmi les fausses idées incroyablement répandues (comme “il faut boire 1,5 l d’eau chaque jour pour être en bonne santé”) il y a celle du coca-cola dé-gazéifié pour “soigner” la diarrhée et/ou la gastro. Ma dernière en date : “comme je vomissais ma copine m’a dit de boire du coca sans bulle”. Alors pour sûr, avaler un grand verre de coca (ou de n’importe quelle autre boisson) après avoir vomi ne peut avoir qu’un seul effet : déclencher un nouveau vomissement. OK là je prend un exemple extrême. Mais ce n’est pas mieux pour la diarrhée : en aucun cas le coca ne guérit la diarrhée (qui dans la majorité des cas guérit toute seule d’ailleurs) et n’est pas, et de loin, la boisson la plus efficace pour lutter contre la déshydratation induite par la diarrhée : les solutés de réhydratation orale prônés par l’OMS contiennent 2,6 g de sel par litre. Le Coca-cola en contient 0,12 soit 20 fois moins. On peut donc même affirmer qu’il est dangereux de se réhydrater avec du Coca.

Le Quotidien du Médecin, bien connu pour sa rigueur et son indépendance, constate avec justesse qu’aucune étude n’a jamais démontré l’intérêt du Coca dans le “traitement de la turista”. Cela est facile à observer en faisant des recherches sur pubmed : ce type d’étude n’existe pas, même financée par Coca-cola. Autrement dit à aucun moment il n’a été démontré que boire du coca-cola était une bonne solution en cas de diarrhée (c’en est même une mauvaise, j’insiste) et pourtant un nombre incroyable de gens pense que c’est vrai. Finement le Quotidien du Médecin, sous la plume du Dr Paul-Henri Consigny, conclue : “Cela dit, il faut être pragmatique : en pratique, le coca est la boisson stérile la plus répandue dans le monde, c’est son meilleur argument. En l’absence de SRO ou d’eau non contaminée, mieux vaut boire du cola que de mourir de déshydratation ! » Boire du Coca ou mourir le choix semble facile.

C’est amusant quand même ce genre d’affirmation : le coca-cola est la boisson stérile la plus répandue dans le monde. Quelle ânerie ! D’abord parce que ce n’est pas vrai, et de loin, ensuite parce que ce qui prime dans la réhydratation ce n’est pas la stérilité du breuvage (même si c’est important) mais sa composition en sels minéraux, et pour ça coca c’est absolument nul (d’ailleurs personne chez Coca-cola ne propose le coca comme traitement de la déshydratation). Trop compliqué pour le Quotidien du médecin semble-t-il.

Ce cher confrère bien informé reprend un argument maintes fois utilisé comme justification, le fameux meilleur argument : on trouve du coca (stérile) partout.

Cet argument d’ubiquité est intéressant à deux titres :

1/ Personne ne le met en doute. C’est l’argument massue qui revient toujours comme une évidence, une démonstration, indiscutable comme l’est la puissance de la compagnie Coca-Cola. Indiscutable comme l’est la puissance du capitalisme occidental capable d’apporter au plus profond des régions reculées des boissons stériles salvatrices sans même le faire exprès. Cet argument qui conforte l’occidental.e dans sa supériorité ne peut que provoquer une résonance immense. On s’en réjouit, on s’en délecte. Pensez-donc, « ils » n’ont même pas de boissons stériles à donner à leurs enfants qui chient de l’eau et « nous », avec un truc aussi simple, basique et courant que le coca-cola, adieu la turista !

2/ Il fait le lien avec ce que je crois être l’origine de cette conception absurde, ou plutôt avec celui qui, bien à son insu, est peut-être à l’origine de cette idée. Il s’agit de Simon Berry.

Simon Berry est un homme admirable qui a décidé de lutter contre la mortalité infantile par déshydratation sur diarrhée aiguë dans les pays en voie de développement. Pas à soigner la turista.

Tout commence en 1988. A cette époque Simon Berry travaille pour le British Aid Programme en Zambie. Il est effaré par le niveau de mortalité infantile et notamment par la quantité de décès par déshydratation aiguë qui pourraient être évités par la simple absorption de Soluté de Réhydratation Orale. Mais de soluté il n’y a point. Alors que du Coca il y en a partout ! Cet écart fantastique entre la non disponibilité d’un produit vital et l’ubiquité du Coca le fait tilter.

Et l’idée qu’il va avoir ce n’est pas de faire boire du Coca pour sauver les enfants (cette idée est complètement idiote au cas où vous n’auriez pas suivi) mais de chercher à utiliser la formidable puissance de distribution du Coca pour mettre à disposition, au plus près des besoins locaux, les Solutés de Réhydratation Orale.

Ce n’est que 20 ans plus tard, en 2008 qu’il arrive à interpeller Coca-Cola et à se faire entendre, utilisant avec habiletés les ressorts des nouveaux réseaux sociaux, son idée va devenir virale.

Et si Coca Cola utilisait ses canaux de distribution (qui sont incroyables dans les pays en développement) pour distribuer des sels de réhydratation ? Par exemple en transformant un casier sur 10 en casier “sauveur de vie” ?

Il fondera une ONG, Colalife pour développer cette idée et je vous invite à lire son incroyable histoire. Elle débouche sur la mise au point du Kit Yamoyo (SRO + Zinc + savon + instructions) et la mise en place d’une chaîne de valeur (un terme barbare de logistique  : travailler toute la chaîne de la production à l’acquisition par l’utilisateur de manière à la rendre optimale) inspirée des méthodes de distribution de Coca Cola et d’autres. Elle a fait l’objet d’innombrables articles. La communication a été un des nerfs de la guerre que mène Simon Berry encore aujourd’hui pour distribuer des Sels de réhydratation auprès de ceux qui en ont besoin.

Je ne ferai pas à mes lecteurs l’affront de penser qu’ils ou elles ne savaient pas que le Coca n’est pas une solution de réhydratation. De nombreux articles l’ont déjà expliqué (un exemple). Je leur recommanderai par contre de continuer à ne pas lire le Quotidien du Médecin.

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Lettre ouverte aux députés contre le projet d’extension de l’obligation de vaccination des nourrissons

Médecins généralistes concernés par le projet d’obligation vaccinale pour les nourrissons,

A Mesdames et Messieurs les députés

Copie à : Monsieur le premier Ministre

Copie à : Madame la Ministre des solidarités et de la santé

Copie aux Présidents de groupes parlementaires

Copie au Président de la République française M. Macron

 

Mesdames et Messieurs les député(e)s :

Nous, médecins généralistes, vous demandons de ne pas voter l’article 34 du PLFSS 2018 élargissant les obligations vaccinales à huit vaccins supplémentaires chez les nourrissons de moins de 2 ans à compter du premier janvier 2018 pour une durée indéfinie. Nous estimons que cette obligation groupée est injustifiée, contraire aux données de la science, aux droits des patients et aux principes du Droit en démocratie.

Parce que nous sommes des citoyens et des professionnels de santé concernés par la santé publique, nous vous écrivons pour nous opposer au projet de loi visant à élargir à onze vaccins au lieu de trois l’obligation vaccinale chez les nourrissons.

Nous ne nous situons pas dans une perspective qui serait celle d’une controverse stérile et idéologique entre partisans et opposants à la vaccination en général.

Nous sommes simplement soucieux de vous sensibiliser au fait que l’histoire des vaccinations en France n’est pas linéaire, qu’elle a connu des succès et des échecs, que des vaccins sont apparus et ont disparu pour cause d’efficacité/inefficacité, voire de dangerosité. Mais nous souhaitions surtout  réaffirmer que chaque vaccination s’inscrit dans une démarche globale de santé publique qui doit associer l’acte vaccinal lui-même à l’amélioration des conditions de vie régnant dans la société et notamment des conditions socio-économiques de certains milieux défavorisés, grâce aux structures sociales d’accompagnement et à des campagnes de prévention primaire et de promotion de la santé.

Pour la première fois en France un gouvernement voudrait faire voter par le Parlement une obligation groupée pour 11 vaccins. La dernière fois que le Parlement a voté une obligation vaccinale c’était pour le vaccin contre la poliomyélite en 1964. Ensuite et à ce jour, considérant que la population était plus instruite que par le passé et en raison de l’inefficacité de l’obligation vaccinale, les autorités n’ont pas jugé utile d’imposer de nouvelles obligations vaccinales.

Donc, pourquoi revenir sur cette décision des années 60 ?

Madame la ministre des solidarités et de la santé indique que l’obligation vaccinale permettra de restaurer la confiance, d’augmenter la couverture vaccinale et par là d’apporter un bénéfice majeur en termes de santé publique. C’est ce bénéfice qui justifierait l’obligation de vaccination des nourrissons par 11 vaccins.

Elle déclare fonder sa décision sur le constat d’un accroissement de la défiance de la population française à l’égard des vaccins qui se traduirait par le déclin de la couverture vaccinale des nourrissons. Or, ces deux arguments nous paraissent sujets à caution. La population française n’est pas fondamentalement méfiante envers les vaccins, comme le montrent différentes enquêtes d’opinion (Annexe I). Mais un infléchissement de la confiance est survenu, et les raisons n’en sont pas mystérieuses. L’origine de cet infléchissement réside  dans  deux épisodes survenus ces dernières années dont les autorités alors en place portent l’entière responsabilité.

Le premier est le précédent de la décision de la vaccination anti grippale de masse contre le virus A (H1N1). Cette crise, qui s’est produite en 2009, a été provoquée par le défaut de prise en compte des données plutôt rassurantes venant de l’hémisphère sud, qui a mené à la décision d’appliquer le plan « grippe aviaire » (mortalité extrême) à une grippe d’intensité normale et par l’exclusion des médecins généralistes du dispositif mis en place, les vaccins fabriqués en masse étant injectés à la hâte dans des lieux de vaccination collectifs en dépit des risques évidents de contamination.

Cet épisode représente un double échec : celui de l’expertise scientifique qui prédisait des dizaines de milliers de morts et celui de la concertation et de la prise de décision partagée entre les politiques, les professionnels de santé et surtout les citoyens. Nul doute que la confiance des Français a été fortement entamée par cette succession d’erreurs.

Le deuxième épisode est celui, non encore résolu, des pénuries récurrentes et durables de vaccins recommandés pour les nourrissons, les enfants et adolescents depuis le début 2015 devant lesquelles les gouvernements successifs sont restés sans réaction alors qu’elles pénalisaient de très nombreux parents. Ces pénuries peuvent facilement expliquer à elles seules la modeste baisse de couverture observée à partir de cette période du fait des contraintes pratiques pour les parents qui ne trouvaient plus les vaccins recommandés dans les pharmacies.

Malgré le risque de baisse de couverture vaccinale dû à cette pénurie, les différents  gouvernements n’ont  pas jugé utile d’intervenir pour mettre fin à cette situation. Pourtant, comme l’a précisé le Conseil D’État dans sa décision du 8 février 2017 concernant l’indisponibilité depuis 2008 sur le marché français du vaccin Diphtérie-Tétanos-Polio obligatoire non combiné à d’autres valences, le gouvernement et la ministre des Solidarités et de la Santé disposent de nombreux moyens légaux pour sanctionner les laboratoires pharmaceutiques défaillants et/ou se substituer à eux. En dépit de cela les ministres successifs ont toujours refusé d’utiliser ces moyens légaux à l’encontre des laboratoires. Cet épisode a également entamé la confiance des Français dans les recommandations vaccinales.

En tant que citoyens éduqués, et en application de la loi du 4 mars 2002, les Français ont le droit d’exiger  des informations précises, claires et robustes sur les tenants et les aboutissants de la vaccination et n’ont pas à être soumis à des décisions précipitées et à une interprétation maximaliste de la concertation sur les vaccins. A plusieurs reprises dans les médias Madame la ministre a évoqué des chiffres inexacts sur la couverture vaccinale alors que celle-ci était en hausse constante chez les nourrissons jusqu’à 2015 (Annexe II), illustrant ainsi l’impréparation, le manque de réflexion et l’absence de fondements solides à sa décision.

En outre, cette décision ne s’inscrit pas dans une vision globale et cohérente de la santé publique. Lorsque le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) émettait des recommandations concernant les vaccins, sa mission n’était pas de déterminer des priorités de santé publique. Le HCSP devait décider si le rapport bénéfice-risque de chaque vaccin recommandé pour la vaccination universelle des nourrissons pouvait apparaître comme acceptable sur la base de différentes hypothèses d’efficacité et d’une connaissance partielle des risques. Ces recommandations comportent donc une part importante de subjectivité et d’incertitude et ne tiennent pas compte du contexte global de santé publique. Les décisions concernant les recommandations vaccinales ont aussi passé outre à plusieurs reprises le mauvais rapport coût-efficacité des vaccins recommandés. Ces aspects ne sont pas un détail dans le cadre du PLFSS et dans  un contexte de restrictions budgétaires où il s’agit de définir des priorités en favorisant les actions de santé publique les plus coûts-efficaces (Annexe III).

Dans une perspective de santé publique, il faut savoir qu’il y a en France environ 2700 décès d’enfants de moins de un an, ce qui permet de définir la mortalité infantile, et 4000 décès au total chez les moins de 15 ans. Toutefois, 99% de ces décès ne sont pas évitables par l’extension de l’obligation vaccinale à huit vaccins supplémentaires. Même dans l’hypothèse irréaliste d’une couverture vaccinale à 100 % et d’une efficacité vaccinale à 100 % stable dans le temps, ce qui signifierait l’éradication de toutes les maladies à prévention vaccinale visées par les recommandations actuelles, les huit vaccins supplémentaires recommandés ne peuvent permettre de prévenir  plus de 1% des décès survenant à ces âges. A titre de comparaison, les causes accidentelles représentent 8 à 9% de la mortalité des moins de 15 ans et 25% des décès soit un décès sur quatre entre 1 et 14 ans.

D’autre part, le  modèle de la rougeole, constamment mis en avant, maladie pour laquelle la diminution du nombre de cas est proportionnelle à l’augmentation de la couverture vaccinale, n’est pas généralisable à toutes les maladies et à tous les vaccins et constitue plutôt une exception.

On peut ainsi noter que parmi les huit vaccins supplémentaires que l’on voudrait rendre obligatoires, certains concernent des maladies qui font déjà l’objet d’une prévention ciblée et qui ne circulent pas parmi les enfants en France.  Ce qui signifie qu’on ne peut pas espérer prévenir des contaminations entre enfants  par l’obligation vaccinale et ainsi  obtenir un  bénéfice en termes de santé publique (hépatite B). Cela signifie aussi que les enfants nés en France admis en collectivité et non vaccinés contre l’hépatite B ne représentent aucun risque pour les autres enfants. Pour d’autres vaccins, ces maladies sont rarissimes même en l’absence de vaccination (méningite à méningocoque C, 120 cas par an en moyenne  dans l’ensemble de la population en l’absence de vaccination et un à  trois décès par an chez les moins de 15 ans). Dans ce cas la vaccination universelle risque de provoquer plus d’effets indésirables graves chez les nourrissons, que de bénéfices dans la population générale. Cette vaccination  est donc préconisée non pour éviter une menace sanitaire grave mais dans l’espoir illusoire, comme le montre l’exemple d’autres pays européens, d’une éradication possible de cette maladie rare. Pour d’autres vaccins enfin, l’efficacité est instable, et leur généralisation a même pu favoriser l’accroissement significatif de la fréquence  dans la population de la maladie que le vaccin devait combattre (vaccin contre le pneumocoque). (voir Annexe III).

Pour chacun des onze vaccins concernés par cette mesure, les parents, vont être privés de la possibilité d’exercer un choix sous peine d’être exposés à des sanctions. Si cette mesure est appliquée, l’absence sur le carnet de santé d’un seul des onze vaccins concernés entraînera pour les parents l’impossibilité d’inscrire l’enfant concerné en collectivité (crèche, maternelle, école, collège, lycée). Le droit d’accéder à l’école étant lui-même étroitement lié à un droit fondamental, celui de l’accès à l’éducation. Or, comment justifier de faire peser de telles contraintes et sanctions sur les parents alors que les risques que feraient courir les enfants non vaccinés à la collectivité sont, pour certains des vaccins concernés par l’obligation groupée, inexistants ou infinitésimaux ?

On peut faire les mêmes objections pour les bénéfices de santé publique attendus qui sont, pour certains vaccins visés par l’obligation, marginaux ou très discutables.

Les sanctions envisagées apparaissent à la fois critiquables moralement  et éthiquement mais surtout, la privation de la liberté de choix et la lourdeur des sanctions associées posent la question de la proportionnalité des contraintes. Cette proportionnalité garantit la défense des droits fondamentaux en assurant que la puissance publique ne puisse limiter la liberté des citoyens que « dans la mesure indispensable à la protection des intérêts publics ».

A l’aune de cet ensemble d’arguments il nous paraît donc légitime que la représentation nationale donne son avis pour chacun des vaccins concernés et qu’elle le fasse en toute indépendance, sur des critères qui soient clairs, démontrés et pertinents  sans déléguer à un groupe d’experts dont certains présentent des conflits d’intérêts financiers avec les laboratoires pharmaceutiques commercialisant ces vaccins, la responsabilité de décisions qui ne devraient avoir pour seul objectif que la protection des individus, ici des nourrissons et des enfants, et l’amélioration de la santé publique.

L’affaire Levothyrox est également là pour confirmer que le manque d’anticipation des autorités sanitaires, le déficit d’information et de concertation avec les professionnels de santé prescrivant et délivrant ces médicaments, et surtout l’oubli initial qu’il y avait trois millions de patients traités ne pouvaient que mener à des incompréhensions, des souffrances, des non-dits, et des rumeurs. Certains patients sont même allés jusqu’à arrêter leur traitement au risque de mettre leur santé en péril.

Madame la ministre des solidarités et de la santé a placé cette obligation sous le signe de la peur, insistant sur les dix décès dus à la rougeole depuis dix ans, mais n’a pas apporté les preuves que cette obligation serait suivie d’effets positifs à court et à moyen terme tant en termes de baisse de la mortalité et de la morbidité qu’en termes d’écologie infectieuse (apparition de résistances et/ou de changements d’âge de survenue des maladies).

Il nous semble donc impossible que vous puissiez voter cette loi en l’état, sans que les réelles conditions d’un débat démocratique aient été instaurées.

En annexe, plusieurs documents vous sont présentés afin d’illustrer cette lettre et de vous éclairer. L’un d’entre eux, l’annexe III, met en évidence les contradictions et les insuffisances dans les motifs ayant mené à cette décision et fait la démonstration que pour au moins trois vaccins sur les onze concernés par l’obligation cette mesure n’apportera aucun bénéfice de santé publique.

 

Premiers signataires :

  • Dr Claudina Michal-Teitelbaum, médecin généraliste
  • Dr Jean-Claude Grange, médecin généraliste
  • Dr Christian Lehmann, médecin généraliste
  • Dr Sylvain Fèvre, médecin généraliste
  • Dr Jean-Baptiste Blanc, médecin généraliste
  • Dr Marc Gourmelon, médecin généraliste
  • Dr Bertrand Stalnikiewicz, médecin généraliste

Version pdf à télécharger pour l’envoyer à votre député : Lettre ouverte pdf

Médecins, signez la pétition de soutien à cette lettre ouverte

 

ANNEXES

Annexe II

 

 

Annexe III

Argumentaire

Le gouvernement et la Ministre de la Santé vous demandent de voter une mesure d’exception en élargissant l’obligation vaccinale et en la faisant passer de trois à onze vaccins, ce qui représente donc huit vaccins supplémentaires entrant dans le cadre d’une obligation. Parmi ces onze vaccins inscrits dans le calendrier vaccinal pour la vaccination universelle des nourrissons trois sont actuellement obligatoires  (diphtérie, tétanos, poliomyélite) et huit sont recommandés [1].

Les précédentes mesures d’obligation vaccinale universelle des nourrissons votées par le parlement français ne concernaient qu’un seul vaccin à la fois et étaient  alors justifiés par des données de santé publique concernant la maladie visée. C’est la première fois dans l’histoire qu’on demande aux parlementaires français de voter  des obligations vaccinales groupées.  Les précédentes mesures d’obligation votées en France au cours du vingtième siècle et encore en vigueur  concernaient la diphtérie en 1938, le tétanos en 1940, et la poliomyélite en 1964. Par la suite, plus aucun vaccin n’a été rendu obligatoire pour la vaccination universelle car, après 1969, l’obligation a été  jugée inefficace et inadaptée vis-à-vis d’une population de plus en plus instruite.

LA vaccination ou DES vaccins ? Il y a-t-il un modèle unique pour la vaccination ou les vaccins doivent-ils être évalués un par un ?

C’est le modèle du vaccin contre la rougeole qui est constamment mis en avant dans le discours des autorités pour justifier l’obligation vaccinale. Pour ce vaccin la réduction de la fréquence de la maladie est proportionnelle à la couverture vaccinale.

On invoque ainsi souvent « l’immunité de groupe », théorie mise au point par Hedrich dans les années 30, justement en observant les épidémies de rougeole et en notant que les épidémies ne se produisaient que lorsque la proportion d’individus immunisés par la maladie était inférieure à un certain seuil.

Par la suite, cette théorie de l’immunité de groupe a été interprétée comme la possibilité d’éliminer une maladie en empêchant l’agent infectieux de circuler dans une population. Ceci pouvait donc être réalisé si une certaine proportion de cette population était immunisée. L’agent infectieux ne circulant plus la maladie devait donc s’éteindre et être éliminée. Les individus non vaccinés seraient ainsi protégés indirectement par les individus vaccinés.

Dans le cadre de cette théorie des modèles mathématiques établissent, pour chaque maladie,  des seuils minimaux de couverture vaccinale à atteindre pour que la maladie soit éliminée. Ces seuils dépendent notamment de la contagiosité de la maladie.

Et il est vrai que, dans le cas de la rougeole, le nombre de cas symptomatiques et le risque d’épidémies et de complications diminuent lorsque la proportion des individus  vaccinés augmente.

Mais le cas de la rougeole n’est pas la règle mais plutôt une exception parmi les maladies à prévention vaccinale.

Par exemple, contrairement à huit vaccins sur les onze visés par l’obligation le vaccin contre la rougeole, comme ceux contre les oreillons et la rubéole avec lesquels ce vaccin est administré sous la forme du vaccin trivalent rougeole-oreillons-rubéole, est un vaccin à virus vivant atténué. Il est donc destiné à provoquer  une véritable infection mais de virulence moindre que l’infection à virus sauvage de telle sorte que celle-ci ne provoque pas de symptômes dans 95% des cas environ. Ces vaccins à virus vivant atténué ont d’ailleurs une autre caractéristique, celle de ne pas nécessiter l’adjonction d’adjuvants.

On voit que l’immunité de groupe, présente plusieurs aspects : protection indirecte des individus non vaccinés par les individus vaccinés et, au-delà d’un certain seuil de couverture  vaccinale, variable selon les vaccins, perspective d’élimination de la maladie en empêchant la circulation de l’agent infectieux.

Mais la rougeole présente une configuration qu’on peut qualifier d’idéale et, pour d’autres maladies, le concept d’immunité de groupe ne peut pas fonctionner si un ensemble de conditions ne sont pas remplies.

Pour qu’une perspective d’élimination de la maladie existe il faut que l’agent infectieux n’ait pas d’autre réservoir que l’Homme et ne circule pas dans d’autres espèces ce qui est donc le cas pour la rougeole. Si l’agent infectieux est transmis autrement que de personne à personne on ne peut pas espérer éliminer la maladie. Si la transmission de personne à personne n’existe pas  on ne peut  pas obtenir de protection indirecte et la protection ne peut être qu’individuelle. C’est le cas pour le tétanos transmis à partir de la terre (réservoir de la bactérie clostridium tétani tellurique).

Pour que la fréquence de la maladie diminue en proportion de l’augmentation de la couverture vaccinale il faut que la pression de sélection exercée par la vaccination ne modifie pas l’agent infectieux au point de le rendre résistant au vaccin. Face à un vaccin vivant, le virus de la rougeole s’est montré génétiquement stable.

Pour qu’un bénéfice de santé publique existe il ne faut pas que l’agent infectieux visé soit remplacé par un autre de virulence égale ou supérieure occupant la même niche écologique.

Cette liste de conditions n’est pas exhaustive, mais permet de remettre en question la théorie qui voudrait réduire l’ensemble des vaccins à un même modèle où les bénéfices apportés par une vaccination universelle seraient simples, constants et proportionnels à la couverture vaccinale.

Voici trois exemples de vaccins faisant partie du groupe des huit vaccins que la nouvelle loi rendrait obligatoires, qui ne remplissent pas les conditions pour représenter un apport de santé publique justifiant l’obligation et les sanctions lourdes imposées aux parents. La proportionnalité des contraintes peut alors être mise en cause.

Le vaccin contre la méningite à méningocoque C

Prenons comme exemple la méningite à méningocoque C, efficacement contrôlée en France par une stratégie de vaccination ciblée autour des cas pendant les années 90 à 2010 . Cette stratégie, consistant à mobiliser les moyens publics pour prévenir d’autres cas dès qu’un cas de méningite se déclare a probablement contribué à réduire l’incidence de l’ensemble des méningites à méningocoque  en France et à classer notre pays parmi les pays à faible incidence pour l’ensemble des méningites à méningocoque avec moins de 1 cas pour 100 000 habitants par an (environ 600 cas) au début des années 2000. Les pays dits «  à forte incidence » comme la Grande Bretagne, l’Espagne ou l’Irlande, comptaient alors plus de 4 cas pour  100 000 habitants par an.

Le méningocoque est une bactérie et il existe plusieurs groupes  de méningocoque. Les groupes  A, B, C , W et Y, occupant tous la même niche écologique.

Le méningocoque du groupe  C est le deuxième groupe  de méningocoque le plus fréquent en France et en Europe après le méningocoque du groupe  B qui représente environ 70% des cas.

Avant  2010 et les recommandations de vaccination universelle des nourrissons, la France, faisait partie des pays à faible incidence pour les infections dues au méningocoque du groupe C avec 120 cas par an en moyenne de méningite dus à cette bactérie entre 1990 et 2010. Dit autrement, cela représente 2 cas par million d’habitants  ou 0,2 cas pour 100 000.  Avec  une létalité  de l’ordre de 11% , cela signifie qu’environ 15 décès par an dans l’ensemble de la population dont 1 à 3 décès en moyenne avant 15 ans sont provoqués par cette bactérie [2].

Les méningocoques sont des bactéries habituellement présentes dans le pharynx et le méningocoque du groupe C est présent  dans le pharynx de 10% de la population sans provoquer de symptômes. C’est ce que l’on appelle le portage asymptomatique des porteurs sains.

La stratégie de vaccination ciblée autour des cas de méningite utilisée en France avant 2010 s’oppose à celle de la vaccination  universelle des nourrissons. La vaccination universelle contre la méningite à méningocoque C est  recommandée pour les nourrissons en France depuis 2010.

Pour le vaccin contre le méningocoque du groupe C, les effets indésirables graves  du vaccin, nécessitant à minima une hospitalisation, seraient de l’ordre de un pour 20 000 doses de vaccin (ou 5 pour 100 000 doses), augmentant, logiquement, avec le nombre de doses [3].

En 2010, on a d’abord recommandé la vaccination par une seule injection de vaccin administrée à l’âge de 12 mois de manière concomitante au vaccin triple contre la rougeole les oreillons et la rubéole. En plus de cette vaccination, le  Haut Conseil pour la Santé publique (HCSP) a recommandé une vaccination de rattrapage par une dose de vaccin jusqu’à 24 ans représentant environ 18 millions de doses de vaccin. Le rapport coût efficacité de cette mesure était jugé mauvais, même avec des hypothèses optimistes de succès.

Depuis janvier 2017, le HCSP a ajouté une deuxième dose de vaccin à l’âge de 5 mois en primo vaccination.

La vaccination recommandée consiste donc désormais en une primo-vaccination à 5 mois et un rappel à 12 mois par un vaccin  polyosidique conjugué à l’anatoxine tétanique. Il s’agit du vaccin Neisvac du laboratoire Pfizer qui est le seul qui possède l’AMM pour ce schéma vaccinal. La vaccination de rattrapage est toujours recommandée.

La protection conférée par ce vaccin, avec deux ou même trois doses  ne persiste que quelques années lorsqu’on vaccine des nourrissons ou des jeunes enfants. Cela était connu et mentionné dans l’avis du HCSP recommandant la vaccination datant de 2010.

L’objectif affiché, officiel, de cette vaccination serait de diminuer fortement le portage pharyngé, c’est-à-dire la présence chez 10% de la population  environ, de méningocoques de type  C, en espérant ainsi éliminer totalement l’infection par ce sérogroupe.

Mais la vaccination ne peut pas garantir, même avec une couverture à 100% par deux doses comme cela est recommandé depuis janvier 2017,  l’élimination de la maladie.

Sans compter que avec deux doses pour une maladie aussi rare, même dans l’hypothèse d’une efficacité maximale, le rapport coût-efficacité de ce vaccin devient très défavorable et dépasse largement le seuil habituellement toléré de 50 000 euros par année de vie théoriquement gagnée selon des hypothèses d’efficacité souvent optimistes.

L’exemple  britannique, comme celui  d’autres pays européens, où la vaccination a été généralisée depuis plus de 15 ans, a démontré que l’élimination n’était pas un objectif accessible.

En Grande Bretagne, qui est un pays où les infections à méningocoque C rapportées par le système de surveillance étaient environ 10 fois plus fréquentes qu’en France avant la vaccination,  trois doses  de vaccin ont été recommandées depuis 1999 chez le nourrisson de moins de un an, avec une couverture vaccinale très rapidement supérieure à 90%.

Après plus de 15 ans de vaccination universelle par trois doses et malgré l’introduction d’un rappel à l’adolescence,  le nombre de cas de méningite à méningocoque C, a été réduit sans que la maladie ne soit éliminée.

Le niveau actuel du nombre de cas de méningite à méningocoque de type C rapportés par le système de surveillance britannique est comparable à celui de la France (30 à 40 cas par an) . En outre, un autre méningocoque (groupe W) émerge fortement chez les adolescents depuis que le rappel à l’adolescence a été recommandé et génère des épidémies chez les collégiens nécessitant des campagnes de vaccination massives et spécifiques.

Globalement, la vaccination de masse  contre la méningite à méningocoque dans certains pays européens n’a pas modifié le classement des pays. Malgré la vaccination les pays à forte incidence pour le méningocoque sont restés ceux où ces infections sont les plus fréquentes .

En Grande Bretagne, le méningocoque du groupe W semble bien  prendre la place laissée vacante par le  méningocoque du groupe C. et à l’échelle européenne, la fréquence des infections par le méningocoque du groupe Y est en augmentation.

D’autre part s’il existe une réduction importante des méningites à méningocoque en Europe, pendant les années 2000, cela est dû en grande partie à l’importante diminution de la fréquence des infections par les méningocoques du groupe B. Le nombre de cas pour ce groupe est passé de 3400 en 2007 à 1766 en 2014 [4], soit une diminution de 50% en 8 ans.

Le mérite du vaccin contre le méningocoque du groupe B ? Non, puisqu’il n’y avait pas de vaccin contre le méningocoque du groupe B. Cette évolution est probablement due à la réduction de certains facteurs de risque connus pour favoriser l’infection comme la promiscuité, et le tabagisme. Donc à l’amélioration de facteurs socio-économiques et relevant de la prévention.

 

Devant une maladie aussi rare et bien contrôlée par la vaccination ciblée,  la stratégie de vaccination universelle, qui risque de beaucoup augmenter le nombre d’  effets indésirables chez les nourrissons sans permettre un bénéfice de santé publique, est discutable et ne représente pour le moins pas une urgence de santé publique.

Le rapport coût-efficacité de ce vaccin pour deux doses dépasse le niveau acceptable, même dans les hypothèses les plus optimistes sur son efficacité.

Compte tenu de la rareté de la maladie en France, de l’efficacité très partielle du vaccin, le risque que font courir des enfants non vaccinés à la collectivité est très discutable.

Voici deux autres exemples de vaccins pour lesquels la vaccination universelle obligatoire a un intérêt très discutable.

Vaccin contre l’hépatite B : pourquoi augmenter la couverture vaccinale des nourrissons ne peut apporter aucun bénéfice

Les vaccins contre l’hépatite B commercialisés en France , sont les vaccins hexavalents des laboratoires Sanofi et GSK et des vaccins monovalents, ne contenant que les vaccins contre l’hépatite B, de ces mêmes laboratoires. Les vaccins hexavalents sont administrés à 2, 4 et 11 mois selon les recommandations inscrites au calendrier vaccinal.

L’hépatite B est une maladie virale qui se transmet essentiellement par voie sexuelle,   et par voie sanguine (toxicomanie , tatouages, activité professionnelle pour les professionnels de santé notamment) dans les pays à hauts revenus, et qui touche le foie.  Dans les pays pauvres d’Afrique noire et d’Asie du Sud-Est elle se transmet fréquemment de la mère à l’enfant pendant la grossesse, et aussi, parfois, entre enfants ou entre parents et enfants. Ce sont essentiellement les porteurs de la forme chronique qui transmettent la maladie.

En France, où la maladie est beaucoup plus rare sous ses différentes formes,   la transmission entre enfants n’existe pas, et la transmission entre parents et enfants après la naissance  est exceptionnelle et concerne très majoritairement les groupes à risque, c’est-à-dire des enfants ou adultes nés à l’étranger,  dans des pays à forte incidence. Le virus ne circule donc pas parmi les enfants et ne sera pas transmis en collectivité.

L’infection se présente  principalement sous trois formes : les nouveaux cas peuvent être aigus symptomatiques, la personne déclenche alors la maladie pendant quelques semaines, ou aigus asymptomatiques. Cette dernière forme représente environ 60% de ces nouvelles infections. La personne est alors infectée mais l’infection passe inaperçue. Une personne ainsi infectée sera immunisée par la suite.

Les enfants de plus de 5 ans et les adultes guérissent de l’infection et sont immunisés dans 95 à 98% des cas. Dans les 2 à 5% des cas restants la maladie peut devenir chronique. Dans ce cas, le virus dégrade progressivement le foie, et une personne sur cinq parmi celles présentant une forme chronique va évoluer, généralement au bout de plusieurs décennies, vers la cirrhose. Pour les enfants de plus de 5 ans et les adultes le risque d’évolution vers la cirrhose est donc de d’environ un  pour 100 personnes infectées.

Pour les jeunes enfants le risque de passage à la chronicité est plus important. Il va de 90% à la naissance, lorsque la mère est infectée et transmet le virus à l’enfant, puis diminue à 50% après 6 mois puis à 30% entre 1 et 4 ans  [5]. En France, les femmes enceinte sont dépistées systématiquement, depuis 1993, pour savoir si elles sont porteuses de la forme chronique de  l’hépatite B. Cela permet de faire une prévention à la naissance qui réduit de plus de 90% le risque d’infection du nouveau-né et de passage à la chronicité.  Aucun nourrisson ne peut naître dans un hôpital ou clinique en France sans que l’on sache si lui ou sa mère sont porteurs du virus .

Les cas d’hépatite B sont en constante diminution en France depuis le milieu des années 80 et donc avant  la campagne de vaccination menée au milieu des années 90 [6].

L’INVS estime actuellement à 291 cas le nombre d’hépatites aigües en France, ce qui représenterait quelques 700 infections  annuelles en tenant compte des cas asymptomatiques  [7]. Parmi ces cas 90% sont des adultes. D’autre part, plus de 80% des nouveaux cas d’hépatites chroniques en France sont constatés chez des personnes nées à l’étranger.

Si l’on tient compte des nouveaux cas d’hépatite aigüe cela signifie que le nombre de cas d’enfants habitant en France contractant une infection par le virus de l’hépatite B est très faible, quelques 70 par an. Une étude britannique, réalisée alors que le dépistage systématique des mères n’existait pas au Royaume Uni, montrait que 50%  des enfants porteurs d’une hépatite B chronique étaient nés à l’étranger et que 25% autres  avaient des parents nés dans des pays à forte incidence pour l’hépatite B [8].

Autant dire, que, avec 70 cas chez les enfants et un risque de 1% de cirrhose parmi ces cas on ne peut espérer empêcher aucun cas de cirrhose en vaccinant des enfants nés en France de parents sans facteurs de risque particulier, qui représentent quelques 90% des enfants vaccinés.

Ce sont pourtant les 1500 cas de cirrhose qui sont mis en avant pour justifier la vaccination des nourrissons.

On peut rétorquer que le vaccin protégera ces enfants à l’âge adulte. Mais la raison pour laquelle la vaccination universelle contre l’hépatite B des nourrissons n’a pas d’utilité en termes de santé publique  est aussi la durée de protection limitée du vaccin. Le groupe d’experts  SAGE (Strategic advisory group of experts) de l’OMS  a établi  qu’aucune protection n’avait été démontrée pour des enfants vaccinées jeunes à l’âge adulte [9].

Pour un tel vaccin l’obligation vaccinale pour l’ensemble des nourrissons nés en France dont la quasi-totalité subiraient les risques d’effets indésirables associés au vaccin, sans pour autant pouvoir en attendre le moindre bénéfice, serait  totalement injustifiable.

Il faut ajouter aux considérations épidémiologiques des considérations commerciales et noter que les laboratoires GSK et Merck ont acheté les brevets les plus importants pour ce vaccin ce qui leur permet de bénéficier financièrement de tous les vaccins contenant la valence hépatite B distribués dans le monde [10]. Or, l’influence des laboratoires dans la recherche et les décisions concernant les vaccins se manifeste notamment à travers les conflits d’intérêts et n’est pas absente en France.

Vaccin contre le pneumocoque

Il s‘agit du Prevenar 13, vaccin du laboratoire américain Pfizer. Ce vaccin est indiqué pour la  vaccination universelle par trois doses à 2 mois 4 mois et 11 mois en même temps que le vaccin hexavalent. Il n’est pas indiqué  chez les enfants en bonne santé après l’âge de deux ans car le taux d’infections invasives à pneumocoque diminue très rapidement après cet âge .

Le pneumocoque est une bactérie qui est considérée comme un hôte normal du pharynx. 60 à 70% des enfants  de moins de 2 ans sont des porteurs sains de cette bactérie. Ils en ont dans le rhinopharynx et peuvent la transmettre sans être malades. Le portage diminue avec l’âge et devient faible vers 8 ans. Le portage permet l’immunisation des enfants contre les sérotypes concernés.

La transmission du pneumocoque se fait par les gouttelettes de salive.

A la faveur de facteurs favorisants, comme les traitements antibiotiques, la promiscuité, l’exposition à la fumée du tabac, ces bactéries peuvent coloniser le pharynx et provoquer des otites ou des pneumonies. Beaucoup plus rarement, en particulier chez des enfants fragiles comme les nourrissons prématurés ou les enfants porteurs de maladies chroniques ces bactéries peuvent provoquer des infections invasives à pneumocoque en passant dans le sang (bactériémies et septicémies) , ou dans les méninges (méningites).

Comme pour la plupart des maladies infectieuses, le risque des infections invasives est relativement plus important chez les enfants de moins de deux ans pour qui les infections invasives à pneumocoque représentaient 27 cas pour 100 000 nourrissons avant l’introduction du vaccin. Toutefois cette tranche d’âge ne représente que 5 à 10% de l’ensemble des   infections invasives à pneumocoque tous âges confondus.

Le pneumocoque comporte 91 sérotypes capsulaires différents, et chaque sérotype répond à des anticorps différents et nécessite donc une immunisation spécifique . Les infections invasives à pneumocoque auront statistiquement plus de risques de se produire si des circonstances favorisantes interviennent .

Ces circonstances, décrites ci-dessus, tiennent principalement à l’état de santé des enfants et à leur environnement  (notamment exposition au tabac) mais aussi aux modes de garde ou à l’importance de la fratrie.

Les sérotypes impliqués dans les infections invasives à pneumcoque ne sont pas les mêmes selon les pays. Il y a, par exemple, une différence importante, de l’ordre de 20%, entre les sérotypes retrouvés dans le pharynx en Amérique du Nord et en Europe.

Les sérotypes impliqués varient aussi avec l’âge et avec la pathologie. Ils ne sont pas les mêmes aux différents âges et ne sont pas les mêmes pour les méningites à pneumocoque, les otites ou les pneumonies.

Cette variabilité des sérotypes impliqués dans les manifestations cliniques et présents dans le pharynx est due à  la grande capacité d’adaptation de cette bactérie.

Les différents sérotypes peuvent échanger du matériel génétique entre eux et ainsi modifier leurs antigènes capsulaires pour échapper aux anticorps dirigés contre eux : c’est ce qu’on appelle le switch capsulaire.

Le pneumocoque est aussi capable de s’adapter  aux pressions de sélection, telle celle exercée par le vaccin, en remplaçant des souches présentes dans le vaccin par d’autres : c’est le phénomène de remplacement.

Le Prevenar 7, contenant 7 sérotypes du pneumocoque introduit en France au début des années 2000, était conçu par le laboratoires américain Wyeth pour combattre les infections invasives dues au pneumocoque chez les enfants de moins de 5 ans aux États-Unis.  Dans ce pays il couvrait plus de 95% des sérotypes retrouvés dans des infections invasives dans cette tranche d’âge  mais seulement 65% des sérotypes des enfants de moins de deux ans en France.

Aux États-Unis le vaccin fut généralisé d’emblée.

L’idée était de diminuer le portage rhinopharyngé  du pneumocoque par les jeunes enfants afin de diminuer la fréquence globale des infections graves à pneumocoque. On pensait que la diminution allait être proportionnelle à la présence des sérotypes  couverts par le vaccin. Par effet indirect, on pensait pouvoir diminuer dans des proportions semblables l’ensemble des infections invasives à pneumocoque dans la population.

Ces projections péchaient, comme souvent s’agissant de vaccins,  par un excès d’optimisme.

En France, le CSHPF  (Conseil Supérieur d’hygiène publique de France) voulut d’abord limiter la recommandation de vaccination aux groupes à risque  et aux enfants exposés à la vie en collectivité ou avec des fratries nombreuses.  La crainte du comité était aussi qu’un phénomène de remplacement des sérotypes ne se produise neutralisant ainsi l’effet positif du vaccin d’un point de vue de santé publique. Il estimait que l’effet espéré du vaccin, à savoir éviter de 8 à 45 décès par an et 54 séquelles, n’était pas suffisant pour justifier une vaccination universelle, compte tenu du risque de remplacement des souches et des effets indésirables [11].

Mais sous la pression commerciale du laboratoire les pédiatres, en dehors de toute recommandation officielle, élargirent la cible vaccinale en vaccinant  50% des enfants de moins de deux ans en 2006. Le CSHPF, subissant lui aussi les pressantes demandes du laboratoire et des experts prit acte de cette situation et recommanda le vaccin pour la vaccination universelle des nourrissons en juin 2006.

Néanmoins, comme le résume un avis du HCSP daté de 2012 [12], la généralisation du vaccin produisit une pression de sélection forte sur le pneumocoque provocant le phénomène redouté par le CHSPF en 2002,  le remplacement des souches présentes dans le vaccin.

Un autre phénomène inquiétant, qui n’avait pas été anticipé, se produisit sous la pression du vaccin, l’émergence rapide d’un sérotype  peu présent auparavant, multirésistant aux antibiotiques et souvent  létal, le sérotype 19A. Celui-ci devint prédominant chez les enfants de moins de deux ans, représentant  jusqu’à 30% des sérotypes impliqués dans des infections invasives à cet âge.

A partir de 2004, la généralisation de la vaccination se traduisit par le remplacement rapide dans toutes les tranches d’âge des souches présentes dans le vaccin. Il y eut une diminution modérée de la fréquence des infections invasives avant l’âge de deux ans avec une augmentation de la proportion des sérotypes 19A mais une augmentation de la fréquence des infections invasives à pneumocoque dans toutes les autres tranches d’âge.

Les infections avant 2 ans ne représentant que 5 à 10% de l’ensemble des infections invasives à pneumocoque, pendant la période entre 1998 -2002 et 2008-2009, il y eut, d’après le HCSP, 1618 cas supplémentaires d’infection invasive à pneumocoque dans l’ensemble de la population chaque année faisant passer leur nombre de 3800 à 5400 par an environ.

En 2006, déjà, dans la population des moins de 18 ans, il y avait plus de méningites à pneumocoque chez les vaccinés que chez les non vaccinés [13].

Malgré cette augmentation globale, du nombre de cas d’infections invasives, malgré les échecs vaccinaux de plus en plus nombreux et les effets indésirables graves constatés par la pharmacovigilance, parmi lesquels des décès de nourrissons, le HCSP ne souhaita pas revenir sur les recommandations de vaccination universelle.

On peut  légitimement penser qu’entre 2006 et 2010 la vaccination fut non seulement inutile mais nuisible à la santé publique ne faisant que contribuer à augmenter le nombre d’infections invasives et provoquant, de plus, de nombreux effets indésirables.

En ce qui concerne les effets indésirables graves, nécessitant des hospitalisations, pouvant laisser des séquelles ou causant le décès, leur fréquence selon les déclarations spontanées varie d’une période à l’autre. Lors de la première période de  vaccination ciblée, pendant 19 mois, où on vaccina les enfants à risque et où l’on mit en place une pharmacovigilance renforcée on déclara 8,4 effets indésirables graves ou inattendus pour 100 000 actes (mais pas de décès). Cela correspond environ à 20 effets indésirables graves pour 100 000 vaccinés ou un effet indésirable grave pour 5000 enfants vaccinés. Dans 67% des cas le Prevenar était administré seul [14] .

Pendant la période de surveillance suivante, de 2004 à 2007, où la surveillance n’était plus renforcée, 221 effets indésirables graves soit un taux de 2,8 effets indésirables graves pour 100 000 doses furent déclarés. Parmi ces effets indésirables des convulsions hyperthermiques, des purpuras thrombopéniques, des décès considérés comme des morts subites et 60 cas d’infections invasives à pneumocoques dont 43 méningites.  Le sérotype était connu dans 32 cas et il s’agissait du 19A dans 12 cas c’est-à-dire dans 37% des cas où le sérotype était connu.  Dans 70% des 221 effets indésirables graves les nourrissons guérirent sans séquelles, dans 15 cas ils gardèrent des séquelles, il y eut 12 cas d’évolution fatale, dont 11 suite à des infections à pneumocoque [15].

Ces 12 décès en 39 mois représentent un nombre important quand on sait que, avant la vaccination, entre 2000 et 2002, le nombre de décès  annuels dus à des infections invasives à pneumocoque  chez les nourrissons de moins de un an était de 9 en moyenne.

En 2010 fut introduit un nouveau vaccin, le Prevenar 13, contenant  six sérotypes supplémentaires dont le 19A.

Ce nouveau vaccin permit de réduire jusqu’à environ 28% l’incidence globale des infections invasives à pneumocoque et jusqu’à 66% celle des nourrissons de moins de un an. Mais, dès 2015, son efficacité s’épuisait de par le remplacement des sérotypes vaccinaux et l’incidence des infections invasives à pneumocoque augmentait à nouveau, en particulier chez les nourrissons de moins de un an (cf Epibac).

Le dernier bilan de pharmacovigilance, en 2015, montrait, entre 2010 et fin 2014, donc sur 5 ans, 252 effets indésirables graves soit un pour 12000 enfants vaccinés et 12 décès dont 5 ont été jugés imputables au vaccin [16].

Le bilan de 13 années de vaccination est une diminution de 1,8% de l’incidence  globale des infections invasives à pneumocoque par rapport à la période allant de 1998 à 2002 comparée à l’ensemble de la période de vaccination  (de 9,16 pour 100 000 à 8,99 pour 100 000). Tandis que les effets indésirables graves seraient  au minimum de 70 à 160 par cohorte d’enfants vaccinés chaque année selon les déclarations spontanées d’effets indésirables . Si on estime que quelques 8 millions de nourrissons ont été vaccinés cela représenterait  au moins 700 à 1600 effets indésirables graves chez des nourrissons.

Pendant la prériode  de vaccination, le portage pharyngé chez les enfants de 6  à 23 mois est passé de 71 à 60% et n’a pas été réduit de manière importante. De plus les sérotypes qui ont remplacé ceux présents dans le rhinopharynx à la période pré-vaccinale ont le même potentiel pour générer des infections invasives  (Centre National de Référence pneumocoque, rapport 2015).

Enfin, le vaccin perd actuellement son efficacité sur plusieurs sérotypes vaccinaux qui s’y sont adaptés : il s’agit des sérotypes 3 et 19F et surtout du 19A dont nous avons évoqué la virulence particulière .

Le bénéfice du vaccin sur les pneumonies ou les otites n’a pas été démontré en France mais uniquement aux Etats-Unis, dans le cadre d’études de faible qualité financées par le laboratoire commercialisant le Prevenar.

Le cas de la France n’est pas isolé en Europe et la réduction de l’incidence des infections invasives à peumocoque dans les pays nordiques, avec des couvertures vaccinales très élevées, n’a pas dépassé 20% .

Pour l’aspect financier, le vaccin Prevenar représente pour le laboratoire Pfizer un chiffre d’affaires de 6 milliards de dollars chaque année soit environ 12% de son chiffre d’affaires.

Existe-t-il des alternatives à la vaccination universelle ?

Lorsque la vaccination universelle ne présente pas une utilité évidente, une alternative bien connue est la vaccination ciblée des groupes à risque. Elle permet d’optimiser le rapport bénéfice-risque en ne vaccinant que les personnes qui ont le plus de risques de contracter la maladie et en évitant aux autres de subir les effets indésirables alors qu’un  bénéfice faible ou nul est attendu.

C’est une stratégie de contrôle de la maladie qui permet souvent d’en diminuer la fréquence sans l’éliminer mais aussi  de diminuer les coûts et les effets indésirables de la vaccination. Or, plusieurs vaccins visés par l’obligation présentent un rapport coût efficacité  défavorable. Et ces évaluations médico-économiques ne tiennent compte que du prix du vaccin et ne prennent pas en compte les coûts spécifiques comme les consultations spécifiques nécessaires, le financement des centres de vaccination et la promotion des vaccins par les agences publiques.

Il faut aussi noter que la charge de l’indemnisation en relation avec les effets indésirables reviendra intégralement à l’État, donc au contribuable, en cas d’obligation.

La vaccination ciblée devrait toujours s’appliquer quand la vaccination universelle n’est pas adaptée à l’élimination de la maladie.

Nous avons vu aussi que des mesures de prévention non spécifiques, comme la réduction du tabagisme et de l’exposition passive au tabac, pouvaient probablement avoir un impact très favorable sur certaines formes graves d’infections bactériennes visées par la vaccination.

Il faut rappeler qu’il  y a en France 73 000 décès attribuables au tabac  et 49 000 décès attribuables à l’alcool et que la France est mal classée au sein de l’OCDE pour la mortalité prématurée due à ces fléaux. L’épidémie d’obésité continue sa progression, par ailleurs, dans les couches défavorisées de la population et chez les adultes.

On peut envisager que dans une période de restriction budgétaire dont on n’aperçoit pas la fin les fonds destinés à la prévention pourraient être mieux utilisés que sur des interventions ayant un mauvais rapport coût efficacité, bénéfice-risque et une portée très limitée en termes de santé publique.

Regagner la confiance ?

Nous avons décrit les raisons principales de l’infléchissement de la confiance dans notre lettre. Néanmoins, il y en a d’autres.

Lorsque L’État, les institutions et les agences ne garantissent pas l’indépendance des experts et des commissions émettant des avis, la  population se tourne vers d’autres sources d’information en cherchant des réponses sur le rapport bénéfice-risque des vaccins, sans être pour autant fondamentalement opposée, pour la majorité de ceux qu’on appelle « les hésitants », au principe de la vaccination.

Or, la composition de la nouvelle Commission technique de vaccination, rattachée à la HAS, qui a pour présidente le Pr Elizabeth Bouvet, n’est pas de nature à renforcer la confiance.

En effet, il faut savoir que quatre laboratoires seulement détiennent la totalité du marché des vaccins utilisés pour la vaccination universelle du nourrisson de l’enfant et de l’adolescent en France. Il s’agit des laboratoires Sanofi, GSK, Pfizer et MSD.

On peut trouver sur le site de la HAS, deux déclarations publiques d’intérêts du Pr Bouvier où elle déclare avoir perçu  environ 20 000 euros de rémunération de la part de divers laboratoires entre 2014 et 2017, mais les chiffres varient d’une déclaration à l’autre [17] , [18]. Mais elle déclare aussi qu’un organisme qu’elle préside, le GERES, groupe d’étude sur le risque d’exposition des soignants, a perçu 500 000 euros en 2012 de la part de divers organismes privés dont les quatre laboratoires dominant le marché des  vaccins en France. Sa déclaration sur le site de la HAS apparaît très incomplète au regard des données accessibles sur le site de la base transparence santé où on peut voir qu’entre 2012 et 2016, Mme Bouvet a reçu 47 avantages et signé 26 conventions avec des laboratoires pharmaceutiques, et notamment les quatre précédemment mentionnés.

Est-ce de nature à permettre un regain de confiance ?

En conclusion on peut dire, que contrairement aux arguments utilisés pour justifier l’extension de l’obligation vaccinale à 11 vaccins, il n’y a pas, en France, de réduction nette de la couverture vaccinale des nourrissons mais seulement la crainte d’une réduction de cette couverture. L’obligation  vaccinale ne garantit pas une augmentation de la couverture vaccinale et aucun bénéfice de santé publique significatif ne peut être espéré pour certains de vaccins concernés par l’extension de l’obligation.

Lorsqu’une population éduquée et informée manifeste le désir de comprendre le rapport bénéfice-risque des vaccins qu’on administre à ses enfants la réponse ne peut pas être la coercition car cela est à la fois contraire aux droits des malades et aux principes juridiques garantissant la pérennité de la démocratie.

Nous contestons la légitimité de cette mesure d’obligation « en bloc » pour huit vaccins supplémentaires et mettons en cause la proportionnalité des sanctions infligées aux parents par rapport aux objectifs de santé publique qu’on peut espérer pouvoir atteindre par cette mesure.

Nous vous demandons donc de ne pas voter cette mesure et de demander que l’obligation puisse être examinée par les parlementaires vaccin par vaccin, et en s’appuyant sur une expertise indépendante.

 

 

[1] Ces onze vaccins comprennent les vaccins contre la diphtérie (D), le tétanos (T) et la poliomyélite (P), actuellement obligatoires, et également le vaccin contre la coqueluche (C), contre l’haemophilus (Hib)B et l’hépatite B (HépB). Ce n’est que depuis 2006, le CSHPF a recommandé d’associer aux vaccins DTPCHib le vaccin contre l’hépatite B .
Ces 6 vaccins sont regroupés au sein d’un vaccin multivalent dit « hexavalent » dont il existe deux versions commercialisées en France, la plus utilisée étant l’Infanrix hexa du laboratoire GSK, la deuxième étant l’Hexyon de Sanofi Pasteur.
Les onze vaccins comprennent aussi le vaccin contre les infections invasives à pneumocoque, le Prevenar13 du laboratoire Pfizer. Ce vaccin est dirigé contre 13 souches de pneumocoque, alors qu’il en existe une centaine. D’abord recommandé pour les groupes à risque au début des années 2000, le CSHPF puis en vaccination universelle depuis 2006 .
Ces deux premiers vaccins, hexavalent et celui contre les infections invasives à pneumocoque, sont des vaccins inactivés, particulaires, des anatoxines ou des vaccins protéiques recombinants qui sont recommandés dans le calendrier vaccinal à 2 mois 4 mois et 11 mois de manière concomitante.
Il faut y ajouter 3 vaccins à virus vivants atténués contre la rougeole , la rubéole et les oreillons, associés dans un vaccin multivalent, qui sont recommandés à 12 mois et dont une deuxième dose est recommandée depuis 2005. D’après le calendrier vaccinal 2017 cette deuxième dose doit être effectuée entre 16 et 18 mois. Deux vaccins associant les trois virus sont commercialisés en France, le Priorix de GSK et le M-M-RVAXPRO du laboratoire MSD.
Depuis 2010, le vaccin contre le méningocoque du groupe C, une des multiples bactéries pouvant provoquer des méningites et des infections invasives est recommandé aussi chez le nourrisson à l’âge de 12 mois. Depuis janvier 2017 le HCSP a souhaité ajouter une deuxième dose de ce vaccin à 5 mois. Le seul vaccin recommandé à cet effet et commercialisé en France est le Neisvac du laboratoire Pfizer.
Ainsi, depuis le début des années 2000, trois vaccins supplémentaires (hépatite B, pneumocoque, méningite à méningocoque C) ont été ajoutés au calendrier vaccinal pour la vaccination universelle des nourrissons Cela représente au total 8 valences supplémentaires de vaccins entre 0 et 18 mois (3 contre l’hépatite, 3 contre le pneumocoque, 2 contre la méningite à méningocoque C).
Un quatrième vaccin oral, le vaccin contre le rotavirus destiné à combattre certaines gastro-entérites virales chez le nourrisson a , en outre, été recommandé. Mais le processus menant à la décision de remboursement du vaccin a été interrompu en mai 2015 en raison d’effets indésirables notifiés spontanément anormalement fréquents et graves et à un âge très précoce (invaginations intestinales, nécroses intestinales, décès…) http://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=501

[2] INVS, les infections invasives à méningocoque en France en 2014. http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-infectieuses/Maladies-a-prevention-vaccinale/Infections-invasives-a-meningocoques/Donnees-epidemiologiques/Les-infections-invasives-a-meningocoque-en-France-en-2014

[3] Bulletin d’information du département de pharmacologie du CHU de Bordeaux, N° 64, décembre 2004. http://www.pharmacologie.u-bordeaux2.fr/documents/pharmacovigilance/INFOS_pdf/62_2004-01.pdf

[4] Rapports annuels européens sur les infection invasives de l’ECDC

[5] Antona D., Hépatite B en France. Aspects épidémiologiques et stratégie vaccinale, INVS, 2004. http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=3713

[6] INSERM , Incidence et prévalence de l’hépatite B en France , http://www.ipubli.inserm.fr/bitstream/handle/10608/205/?sequence=12

[7] Cécile Brouard. INCIDENCE ET MODES DE TRANSMISSION DE L’HÉPATITE B AIGUË DIAGNOSTIQUÉE EN FRANCE, 2012-2014, Santé Publique France déc 2016. http://invs.santepubliquefrance.fr//beh/2016/13-14/pdf/2016_13-14_3.pdf .

[8] Shalez N, Epidemiology and Clinical Features of Childhood Chronic Hepatitis B Infection Diagnosed in England, Pediatric Infectious Disease Journal, Vol. 33, No. 2, 02.2014, p. 130-135. https://kclpure.kcl.ac.uk/portal/en/publications/epidemiology-and-clinical-features-of-childhood-chronic-hepatitis-b-infection-diagnosed-in-england(62461ae2-52b1-440f-abab-fbfc668d9cc2)/export.html

[9] http://www.who.int/immunization/hepb_grad_duration.pdf

[10] IP Handbook of best practices , DNA Hepatitis B Vaccine: International Vaccine Institute, Korea. http://www.iphandbook.org/handbook/case_studies/cs09/

[11] CSHPF, Avis du Conseil supérieur d’hygiène publique de France, section maladies transmissibles relatif à la vaccination par le vaccin pneumococcique hexavalent. Séance du 8 mars 2002.

[12] HCSP, Vaccination du nourrisson contre les infections invasives à pneumocoque par le vaccin pneumcoccique 13 valent, 02/02/2012.

[13] Lévy, Méningites à pneumocoque de l’enfant en France : 832 cas de 2001 à 2007. Pneumococcal meningitis in children in France: 832 cases from 2001 to 2007, Archives de pédiatrie, Volume 15, n° S3, http://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=255

[14] Bensouda-Grimaldi, Suivi de pharmacovigilance du vaccin Prevenar , Archives de pédiatrie, janvier 2007. http://www.em-consulte.com/en/article/64571

[15] Commission nationale de pharmacovigilance du 27 janvier 2009. http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/ab6de4eceefb6b2645865f74256fbaeb.pdf

[16] Réunion du Comité technique de pharmacovigilance du 17 mars 2015. http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/b69523172f8bb3bbf7dd9dedfc362b74.pdf

[17] https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2017-06/dir35/1bouvetelisabeth06-06-17.pdf

[18] https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2017-04/dir7/1bouvetelisabeth07-04-17.pdf

 

 

Comédie dramatique

Je visite Marcelle à domicile depuis 6 mois environ. Octogénaire, artéritique, insuffisante coronarienne avec rétrécissement aortique, insuffisante cardiaque de ce fait, insuffisante rénale, percluse d’arthrose, Marcelle ne sort plus de chez elle et je l’entend souffler comme une locomotive chaque fois qu’elle vient m’ouvrir. Je suis appelé pour une rougeur douloureuse sur la jambe. Elle vint de rentrer d’une assez longue hospitalisation en cardiologie – je l’y avais adressée pour des douleurs d’allure coronarienne assez inquiétantes – et va plutôt bien, contente d’être rentrée chez elle. Je ne lui porte pas plus d’attention que ça quand elle me dit qu’elle trouve bizarre de pisser moins alors qu’elle prend deux fois plus de lasilix qu’avant (elle n’est pas encore passée aux DCI), diagnostique un début d’infection cutanée (erisypèle) et lui prescrit une pommade antibiotique, lui demandant de me rappeler si cela ne s’arrange pas où si elle se met à avoir de la fièvre.

C’est l’infirmière qui me rappelle une semaine plus tard : Marcelle a pris près de 5 kg par rapport à la dernière pesée et lui semble plus essoufflée que d’habitude – si cela est possible. Je viens la voir bien décidé à la faire ré-hospitaliser si nécessaire. Comme d’habitude je l’entend souffler derrière la porte. Comme d’habitude, une fois rassise sur son lit sa respiration s’apaise. Son infection cutanée est guérie, nous papotons, je l’ausculte, elle a des crépitants aux bases comme souvent, pas d’œdème des membres inférieurs – mais on est le matin et « je dors avec les jambes surélevées docteur ». sEs paramètres tension et pouls sont dans les eaux habituelles. Dans le carnet de liaison, je vois que l’infirmière lui a donné du racécadotril (elle est passée aux DCI elle). « Vous avez la diarrhée ? » « Oh oui depuis que je suis rentré de l’hôpital, j’ai la diarrhée, c’est pénible. Et puis j’ai tout le temps envie de dormir, vous croyez que c’est quoi docteur ? » Me revient l’histoire de la diurèse. « Et au fait vous pissez normalement maintenant ? » Oh non, je pisse moins qu’avant, je ne comprend pas avec les deux Lasilix (sic) je devrais pisser plus ! »

Je me lance alors dans une conjecture qu’il serait difficile de QCMiser aux ECN : Marcelle semble manifestement décompenser son insuffisance cardiaque or elle vient de passer 4 semaines en cardiologie dans un grand service parisien. Logiquement elle doit aller bien (ou en tous cas pas plus mal au plan cardiologique). Si elle ne va pas bien c’est qu’il s’est passé quelque chose entretemps. Comme il ne s’est rien passé depuis sa sortie je n’ai pas d’autre idée que de voir ce qu’elle prend comme médicaments – ça a un peu changé et, bien que je l’ai regardée la semaine passée, je reprend l’ordonnance de sortie. Rien que de très normal pour son état mais une nouveauté sur laquelle je n’avais pas percuté : du Lyrica 100, 2 par jour (apparemment à l’hôpital ils ne sont pas encore passé aux DCI). « C’est nouveau le Lyrica là, ça vous fait du bien ? » « Ah oui j’ai beaucoup moins mal aux jambes. »

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J’ignore quasi tout des effets indésirables du Lyrica mais j’ai une base de médicaments dans mon smartphone. Plus efficace que ma mémoire. Et là que vois-je, parmi les (incroyablement nombreux) effets indésirables possibles :

  • très fréquent : somnolences
  • fréquent : prise de poids (mais la prise de poids rapide plutôt due potentiellement au suivant)
  • peu fréquent : insuffisance cardiaque congestive
  • rare : oligurie, insuffisance rénale

Surtout je lis dans Précautions d’emploi que « la prégabaline doit être utilisée avec précaution chez les personnes insuffisantes cardiaques » et dans Posologie que « la dose doit être adaptée à la clairance de la créatinine ». Ma religion est faite : il faut en tous cas arrêter ce médicament et voir ce qui se passe et si rien ne se passe il faudra l’hospitaliser. Je me donne 48/72H.

Je me plonge alors dans le pilulier, ou plutôt dans la corbeille de médicaments afin d’identifier la prégabaline pour la retrouver dans le pilulier et la retirer tout de suite. Horreur ! la boite de Lyrica est une boite de gélules de 200mg.Et ce sont bien ces gélules de 200 mg qui se trouvent dans le pilulier. Marcelle prend donc 400mg par jour, le double de la dose prescrite. Je tiens le bon bout. J’extirpe alors les grosses gélules du pilulier (avec difficulté d’ailleurs, je me demande toujours comment font les personnes âgées aux doigts mal agiles) et les jette à la poubelle. Coup de chance elle a oublié de prendre ses médicaments hier soir (somnolent elle s’est endormie plus tôt) et ne les a pas encore pris ce matin, je suis venu à l’aube. Un tour de gagné. Petit mot dans le cahier de liaison pour signaler l’erreur de dispensation. Explications à Marcelle qui ne rechigne pas alors qu’elle sait bien que du coup ses douleurs vont revenir… Mais on verra ça dans deux ou trois jours, je sais qu’elle a des réserves de tramadol !

Trois jours plus tard j’appelle 

– Allo bonjour c’est le docteur Blanc
– Oui bonjour (une voix qui n’est pas celle de Marcelle)
– J’appelais pour prendre des nouvelles de Marcelle, je suis son médecin traitant
– Je suis sa fille, Maman est morte ce matin.

Epilogue

Comme vous pouvez l’imaginer je me sens assez mal depuis ce coup de fil et je me pose beaucoup de questions :

  • Aurais-je du l’hospitaliser et ne pas me contenter de stopper le traitement ? Et si oui est-ce que cela aurait changé les choses ?
  • Aurais-je du au moins lui faire prélever de suite un bilan sanguin, vérifier l’ionogramme, la NFS, le BNP et ne pas attendre 2 à 3 jours pour observer l’évolution ?
  • Aurais-je du rappeler le lendemain de ma visite comme j’avais prévu de le faire alors que, débordé je l’ai remis d’un jour ?
  • Une semaine plus tôt, j’ai regardé son ordonnance. Je n’ai pas percuté sur le Lyrica. Si j’avais bien connu les risques cardiaques de cette molécule sans doute aurais-je été alerté plus tôt ? Mais comme l’ordonnance avait été écrite par des cardiologues du CHU, je n’ai pas ressenti le besoin de vérifier (elle était par ailleurs assez cohérente cette ordonnance).
  • Une semaine plus tôt je n’ai pas non plus tiqué sur la baisse de diurèse. D’une visite à l’autre il y avait toujours des plaintes fonctionnelles nouvelles avec Marcelle, un genre de filtre avait fini par se mettre en place et je me concentrais sur les paramètres vitaux.
  • Comment se fait-il que la dose double de prégabaline ait été dispensée à la fois par le pharmacien et par l’infirmière ?
  • Comment se fait-il que les cardiologues qui connaissaient parfaitement son cas lui aient prescrit cette molécule ?
  • De quoi est-elle morte au fond ?

J’ai longuement hésité à publier ce texte dont la première partie a été écrite avant le décès de Marcelle. Je le fais en pensant qu’il permettra peut-être à d’autres drames de ne pas se produire.

10 commandements pour un traitement centré sur le patient

1 – Tu n’auras d’autre but qu’aider les patients en fonction des objectifs qu’ils veulent atteindre

Quand il faut décider d’un traitement, le premier diagnostic que tu as besoin de faire concerne la nature de la maladie. Le second diagnostic dont tu as besoin concerne ce que le patient aimerait atteindre. Les deux sont d’importance égale et cela est aussi vrai dans des consultations uniques simples que dans des maladies chroniques complexes. Mais la balance nécessite une considération particulièrement soigneuse quand il s’agit de démarrer un traitement à long terme.

Assure toi toujours que tu comprends bien les buts de tes patients avant de proposer un plan d’action. Cela peut prendre 3 minutes dans une situation comme une inflammation aiguë de la gorge ou des années de dialogue continu dans des situations comme une sclérose en plaque ou une insuffisance cardiaque. Ne présume jamais que tu sais pourquoi ton patient est venu ni que les traitements que tu peux proposer répondent aux buts de tout le monde de la même manière.

(Ten years later)

2 – Tu chercheras toujours à connaître les bénéfices, les risques et les coûts des traitements et tu partageras cette connaissance à chaque fois

Les professionnels de santé autant que le profanes tendent à surestimer les bénéfices des traitements et à sous-estimer leurs risques. Ceux-ci s’expriment traditionnellement en Nombre de Sujets à Traiter (NST ou Number Needed to Treat – NNT – en anglais) et en Nombre de Sujet pour Nuire (NSN ou Number Needed to Harm – NNH – en anglais).

Il est important d’avoir une bonne vision de ces chiffres pour les situations cliniques communes mais il est tout aussi important de garder leurs limitations à l’esprit. En premier lieu, les patients pour la plupart trouvent les notions de NST et de NSN difficiles à comprendre. En second lieu, les nombres ne s’appliquent pas aux gens individuellement mais représentent juste des chiffres moyens calculés sur des populations d’essais cliniques. Enfin les gens ont des vues très variées sur la manière dont ils apprécient la balance entre un bénéfice donné contre un risque donné.

Ainsi nous avons besoin de meilleurs moyen de a) connaître les NST et NSN des populations que l’on soigne; b) partager cette connaissance avec les gens d’une manière qu’ils puissent comprendre; c) appliquer cette connaissance aux buts et aux préférences de la personne en face de nous.

(Déterminer la balance bénéfices-risques d’une intervention)

3 – Tu considéreras joyeusement l’attente vigilante – si tout le reste échoue ou si les preuves manquent – comme un moyen d’action approprié

Le premier commandement assume qu’il y aura deux diagnostics à chaque consultation. Mais souvent il y en aura plus, ou aucun.

Beaucoup de consultations consistent en un dialogue d’exploration complexe, des tentatives de compréhension et une incertitude partielle. A moins qu’il n’y ait un diagnostic clair, il est habituellement préférable de proposer une nouvelle consultation plutôt que de faire une prescription.

D’autres situations dans lesquelles il est habituellement préférable de ne pas prescrire comprennent les maladies aiguës à résolution spontanée pour lesquelles des traitements symptomatiques se trouvent en vente libre. Cela s’applique également à certaines pathologies chroniques comme le syndrome de l’intestin irritable ou la douleur dorsale chronique qui ont comme caractéristique de fluctuer et pour lesquelles les médicaments sur prescription ne sont habituellement pas plus efficaces que les médicaments bon marché sans prescription.

On devrait toujours résister à la tentation de prescrire plutôt que de proposer une réévaluation au moment opportun.

(Faire, défaire, le savoir-ne pas faire ?)

4 – Tu honoreras les sources de connaissance équilibrées et tu te garderas de toutes celles qui cherchent à te tromper

Il n’existe pas de source unique de connaissance sur les traitements efficaces qui soit fiable, sans biais, continuellement mise à jour et partageable entre les patients et les professionnels de santé. L’approximation la plus proche est Wikipédia qui est aussi la ressource globale la plus largement utilisée bien qu’il lui manque le support et l’infrastructure nécessaires pour être complète dans sa couverture et sa mise à jour.

D’autres ressources largement utilisées au Royaume-Uni par les patients comprennent NHS Choices et des sites de fondation de charité comme la British Heart Flundation ou Diabetes UK. Les professionnels de santé utilisent également la BNF, NICE guidelines, GP notebook et la Cochrane Library. Mais aucune de ces sources n’est adaptée à la prise de décision partagée en consultation.

De plus les médecins sont ciblés par le marketing direct et indirect des industries du médicaments et du matériel médical visant à les persuader que les nouvelles interventions sont plus efficaces que les anciennes. Ce qui est à peu près toujours faux et toujours plus cher. La promotion indirecte vers le public passe par les médias d’information et parfois par les organisations de patients si elles acceptent les fonds de l’industrie. La prise de décision partagée avec les patients devrait s’appuyer sur une connaissance claire des risques et des bénéfices provenant d’une analyse objective et d’une comparaison entre les alternatives existantes. Toute source d’information sponsorisée par l’industrie devrait être évitée.

(Dire non)
(Pourquoi garder son indépendance face aux laboratoires pharmaceutiques ?)

5- Tu traiteras en fonction du niveau de risque et non pas du niveau de facteur de risque

Traiter des individus asymptomatiques pour prévenir des événements adverses futurs nécessite un processus de partage d’information différent et plus long que traiter une affection aiguë non compliquée. Il doit s’appuyer sur des preuves plus rigoureuses concernant les risques et les bénéfices, d’autant plus qu’ils s’appliquent à chaque individu.

Des interventions à vie devraient être déterminées en fonction de l’importance du résultat pour chaque personne, pas sur l’extrapolation de la réduction d’événements dans une population globale. Les gens varient largement dans leurs comportement vis à vis de la prévention de la mort, de l’infarctus du myocarde, de l’AVC ou des différentes sortes de cancers ainsi que dans la manière dont ils soupèsent les bénéfices et les risques des traitements.

La proposition d’un traitement préventif  – qu’il soit primaire ou secondaire – doit prendre en compte les buts de ces individus, buts qui peuvent changer dans le cours du temps. Il ne devrait pas viser la réduction d’un simple facteur de risque mais la totalité du risque pour une conséquence particulière. Par exemple si quelqu’un souhaite éviter une maladie coronarienne, les facteurs de risque doivent être évalués individuellement et ensuite agrégés (approximativement) en utilisant un système de score. Cela peut alors nourrir une discussion à propos des différents éléments de ce risque et comment il peut être réduit en utilisant des interventions non médicamenteuses et médicamenteuses. De plus de telles estimations peuvent apporter des découvertes surprenantes. Par exemple une statine peut s’avérer être la meilleure stratégie chez une personne à haut risque avec un niveau de LDL cholestérol “normal”.

Toute intervention médicamenteuse pour réduire des facteurs de risque possède des risques potentiels et réduit rarement le risque en proportion de la réduction du facteur de risque (ou résultat intermédiaire – surrogate marker).

(Recherche calculateur de risque CV désespérément)

6 – Tu ne te prosterneras pas devant les cibles thérapeutiques formulées par les commissions car elles sont tout sauf gravées dans le marbre.

Traditionnellement, des augmentations de facteurs de risque isolés comme la pression artérielle ou le niveau des lipides ont été étiquetés hypertension ou hyperlipidémie et des gens (typiquement sans symptômes) ont été encouragés à prendre des médicaments pour les réduire à un certain niveau.

Le niveau très élevé du NST pour un tel traitement est souvent inconnu du prescripteur et encore plus rarement discuté avec son destinataire qui reçoit une étiquette de maladie et devient un patient qui sera suivi à des intervalles réguliers pour le reste de son existence.

Ce modèle traditionnel s’est ancré dans de nombreuses recommandations et dans le “Quality and Outcomes Framework » (l’équivalent de la ROSP au Royaume Uni – NDT). Les médecins sont payés pour la réalisation de résultats intermédiaires comme la pression systolique, le cholestérol total ou l’hémoglobine glyquée. Cela peut être démotivant pour la mise en œuvre du processus essentiel de prise de décision partagée qui doit toujours rester prioritaire sur la réalisation d’objectif imposés de l’extérieur.

(Le bon docteur, les critères de substitution, les bons sentiments et l’HbA1C)

7 – Honore ton patient âgé car bien qu’il soit souvent à très haut risque médical, il est aussi à très haut risque iatrogène.

L’âge accroît le risque de maladie cardiovasculaire et de la plupart des cancers. Cela amplifie l’effet apparent des traitement de réduction de risque mais ces traitements ne peuvent que retarder le décès, pas l’éviter. La qualité de la vie restante peut souvent être plus importante que sa durée.

Pour ces raisons il est particulièrement important de prendre en compte les préférences individuelles chez les personnes âgés, à la lumière des NNT, des risques possibles et de la valeur absolue de la prolongation de la vie apportés par chaque traitement.

Les informations fournies par les études randomisées contrôlées proviennent souvent de populations sans comorbidités majeures et qui sont plus jeunes que la plupart des patients avec l’affection. La prise de décision thérapeutique chez les personnes âgées à morbidités multiples et prenant des médicaments multiples est lourde de difficultés et il existe souvent peu de preuves sur lesquelles fonder les combinaisons de traitement. Aussi il est essentiel de clairement comprendre ce que les individus vivent sous traitement, ce qu’il souhaitent, et d’être honnête à propos des bénéfices, des risques et des incertitudes.

(Les dangers de l’utilisation du tramadol)

8 – Tu arrêteras tout traitement dont le bénéfice n’est pas clair et tu réévalueras régulièrement la nécessité de tous les traitements et examens complémentaires

Considère toujours les médicaments que tu peux arrêter avant de considérer ceux que tu peux démarrer.

A chaque consultation avec un patient qui prend un médicament, examine pourquoi il le fait et considère toi responsable de sa poursuite à moins qu’il n’y ait un autre médecin qui ait cette responsabilité. Si la consultation est à propos d’autre chose et que tu n’as pas le temps de le faire correctement, assure toi que cela sera fait lors d’une autre occasion rapidement. Ne présume pas que tout va bien et que quelqu’un d’autre va s’en préoccuper. Les patients ne parlent pas souvent les effets secondaires et les cliniciens ignorent fréquemment les rappels.

(Déprescrire chez les personnes âgées)

9 – Tu essaieras avec diligence de trouver le meilleur traitement pour chaque personne car des traitements différents fonctionnent pour différentes personnes

Le NNT devrait rester un point de départ pour les médecins : il te donne une idée grossière de la probabilité qu’un traitement particulier aura quelque effet sur une population d’essai ou un sous-groupe pré-spécifié. Les patients ont raison de trouver cela difficilement applicable à eux-mêmes.

Pour la plupart des conditions symptomatiques le NST permet simplement d’identifier les traitements intéressant à examiner en premier lieu. Le coût autant que l’efficacité peut être considéré. Par la suite trouver le le médicament le plus efficace peut nécessiter un ou plusieurs essais. Dans certaines situations, comme la douleur neuropathique, il peut être intéressant d’essayer des médicaments possédant une faible probabilité de bénéfice s’ils offrent la possibilité de réussir quand les molécules les plus probablement efficaces ont échoué.

10 – Tu chercheras à utiliser aussi peu de médicaments que possible

Avant de prescrire, examine si une intervention non médicamenteuse pourrait être aussi ou plus efficace. N’utilise pas de médicaments comme raccourci au fait que les alternatives pourraient prendre plus de temps à expliquer ou être plus difficiles d’accès.

Comme règle générale pour la prescription de médicaments à long terme, il est mieux d’utiliser une seule molécule et de démarrer à la plus faible dose possible. Cela apporte en général la meilleure balance bénéfices risques. Par exemple, dans l’insuffisance cardiaque, la plus petite dose d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion apporte à peu près les mêmes bénéfices sur la mortalité que la dose la plus forte avec un risque beaucoup plus faible d’hypotension, d’hypokaliémie ou de syncope. Si tu décides de titrer, discute bien du bénéfice marginal avec ton patient.

Il est parfois utile d’utiliser de faibles doses d’une combinaison de molécules, par exemple pour réduire la pression artérielle. Mais soit attentif aux risques de nuisance potentielle et d’interactions indésirables. Avant d’augmenter la dose ou d’ajouter une autre molécule, assure toi que tu as suffisamment essayé le traitement initial et que ton patient le prend vraiment.


Traduit de
R Lehman, J McCormack, T Perry, A Tejani, J Yudkin
Ten Commandments for patient-centered treatment
British Journal of General Practice 2015;65:532-3
Par
JB Blanc qui les remercie d’avoir rendu leur texte original ouvert à tous.

Pour plus de références consultez l’article en référence ci-dessus ou le très bon site dédié Ten commandments for patient-centered treatment en anglais

Merci à JC Grange, Sylain Fèvre, Benoit Soullié et au Formindep pour leur contribution à l’illustration de ces commandements.