La part de l’humain est immense en médecine générale, souvent bien loin de l’approche technique enseignée à la fac et des beaux logigrammes de l’HAS. Réfléchir à l’erreur en médecine générale, à comment la minimiser ne se résoudra pas en remplissant les cases de procédures ou de check-list. Les commentaires de Perruche automnale à mon précédent billet sont limpides à ce sujet. Mais dans la mesure où l’on admet, à l’instar de Brian Goldman que les médecins font forcément des erreurs parce qu’ils sont humains, il devient intéressant de tenter d’aller plus loin que de le reconnaître.
Dans ce billet, stimulé par les apports de Perruche automnale dans ses commentaires précités, je tente de jeter les bases de la réponse à la question : comment diminuer les erreurs en pratique de médecine générale, sans prétendre ni épuiser le sujet ni donner de leçons. Disons en tentant de réfléchir à voix haute.
Être conscient d’être faillible
Savoir que l’on fait et que l’on fera des erreurs, ne pas se croire infaillible est la première démarche.
C’est la grande leçon de Brian Goldman : « J’ai fait et je ferai des erreurs parce que je suis un humain. Je demande à pouvoir en parler et être écouté à ce sujet. Je demande à ce que les autres puissent en parler. »
Être sûr de soi, être convaincu que l’on sait mieux que quiconque, ne pas être capable d’écouter la critique, c’est bien se mettre dans la position du commandant seul maître à bord (cf billet précédent) et augmenter le risque de faire des erreurs.
Être conscient des limites de ses connaissances et les actualiser
Connaissances et compétences sont essentielles et doivent en permanence être actualisées, sans aucun doute. Cela est d’ailleurs rendu d’autant plus difficile que pour bien des questions il n’y a pas de réponse absolue. Mais une chose me semble aussi voire plus importante encore : être conscient des limites de ses connaissances, savoir exactement quand on ne sait pas.
Connaître ses limites et ne pas les dépasser, voilà qui plairait à M Fenouillard.
Connaître les mécanismes d’erreur
Comprendre qu’erreur médicale ne signifie pas erreur du médecin
Erreurs diagnostiques
Un diagnostic erroné est porté dont il découle une mauvaise décision thérapeutique
Erreurs thėrapeutiques
– Une mauvaise action thérapeutique est décidée
– Une bonne action thérapeutique est décidée mais mal réalisée
~ Par un autre soignant
~ Par le patient ou par son entourage
Erreurs par omission
Un traitement utile n’est pas prescrit
Erreurs de communication
– Entre soignants. Voir par exemple toutes les difficultés de communication entre hôpital et médecine de ville, forcément source d’erreurs
– Entre soignant et patient ou proches du patient
~ Je ne dis pas une chose importante à mon patient
~ Je dit une chose importante à mon patient mais il ne la comprend ou ne l’accepte pas
~ Je ne m’assure pas que mon patient a compris ou accepté les consignes que je lui donne
Erreurs de relation
Développement d’une relation inefficace ou maltraitante, mauvaise ou absence d’écoute
Erreurs de contexte
Par exemple non prise en compte des capacités cognitives du patient, de sa culture, de ses moyens financiers, etc.
Connaître les causes d’erreurs médicales
Quels sont les facteurs qui viennent renforcer le risque que des erreurs se produisent ?
Causes personnelles
– Etre trop sûr de soi
Grande difficulté a se remettre en cause
– Difficulté a sortir du fonctionnement binaire
– Difficulté à garder toujours le recul nécessaire
– Manquer de rigueur
Peser balance bénéfices risques
Toujours vérifier les médicaments pris
– Défaut ou insuffisance de connaissances
Travailler, lire, se former
Causes externes
– Difficultés de vigilance
~ MG = Activité qui mélange bénin et très grave
~ Gardes, nombreuses c / jour, semaines chargées…
– Difficulté à remettre en cause l’autorité
Si le spécialiste, le professeur du CHU l’a dit, prescrit, alors je ne peux le remettre en question
– Difficultés devant la pression du patient, la lassitude d’argumenter.
Voilà pour une première tentative de systématisation. Qu’en pensez-vous ?
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